Sainte Zita de Lucques
Sainte Zita de Lucques
« La main au travail, le cœur à Dieu » (Devise de sainte Zite)
1212-1272
Fête le 27 avril
Sainte Zita eut pour parents de pauvres laboureurs de Bozzanello, village situé sur le mont Sagrati, à trois lieues de Lucques. Elle naquit en 1218. Pauvres des biens de la fortune, son père et sa mère étaient riches des biens de l'âme et fervents serviteurs de Dieu. Avec sainte Zita, ils eurent deux autres enfants qui embrassèrent la vie religieuse et moururent en odeur de sainteté. Parvenue à l'âge de douze ans, sainte Zita entra comme servante chez un seigneur de la ville, Pagano de Fatinelli, dont la maison était attenante à l'église de Saint Fridien. Elle ne vit dans son état qu'une plus grande facilité de se sanctifier, puisqu'elle était à portée d'y mener une vie laborieuse, pénitente, mortifiée, et de ne faire jamais sa volonté. D'un autre côté, elle s'estimait heureuse d'avoir toutes les choses nécessaires à la vie, sans être exposée à ces troubles, à ces agitations qu'il en coûte ordinairement pour se les procurer. Aimant Dieu par-dessus toutes choses, l'humble servante se levait de bon matin pour aller répandre son cœur devant le Seigneur et assister à la sainte messe. Jésus prit en affection cette pauvre fille et se plut à orner son cœur de toutes les vertus. Elle fit de rapides progrès dans la piété et l'on vit bientôt briller en elle toutes les vertus, l'humilité, la douceur, la modestie, la patience, la charité, le support des défauts d'autrui. Comme il n'arrive que trop souvent, les autres serviteurs de la maison la détestaient à cause de sa piété et lui firent subir toutes sortes d'humiliations que la servante de Dieu supporta avec douceur et résignation. Dieu inspira à sainte Zita le désir de se vouer tout entière à lui; elle fit voeu de virginité et mena dès lors une vie pénitente et mortifiée. Elle réduisit son corps en servitude pour étouffer ses révoltes mais la vertueuse fille sortit triomphante de toutes ces tentations.
Les flammes de la charité que la communion fréquente allumait au dedans de son âme se répandaient au dehors sur les pauvres. Elle saisissait toutes les occasions de leur rendre les services qui étaient en son pouvoir, et Dieu récompensa souvent par des miracles éclatants les actions de sa servante. Il y eut alors une famine et sainte Zita, touchée de la misère de tous ceux qui venaient frapper à la porte de son maître, se mit sans réfléchir à leur distribuer des fèves qu'elle allait puiser dans un grand coffre, puis tout à coup en pensant qu'elle n'avait pas demandé à son maître la permission d'agir ainsi, elle fut saisie de crainte et pria Dieu d'écarter d'elle les conséquences de son action. Le seigneur Fatinelli voulut en ces jours faire mesurer ce qu'il possédait de fèves. Sainte Zita épouvantée se cachait derrière sa maîtresse tout en s'étonnant que le maître ne dît rien. Les coffres étaient pleins comme auparavant. Sainte Zita remercia le Seigneur de sa générosité. Dieu ne pouvait rien refuser à sa servante, il suppléait même à ce qu'elle oubliait parfois de faire, absorbée qu'elle était par la prière. Un jour qu'elle était restée longtemps à l'église, elle s'aperçut avec terreur que le soleil était déjà haut sur l'horizon: or, elle devait pétrir ce jour-là et faire cuire le pain; elle s'attendait à des reproches, mais les anges avaient fait sa besogne, elle trouva le pain prêt à mettre au four, et reconnut à la suave odeur qu'il exhalait, les ouvriers qui l'avaient, fait. Un pèlerin brûlé de la soif et de la chaleur, lui demanda un jour l'aumône. N'ayant absolument rien, elle ne savait que faire tout à coup elle lui dit d'attendre un instant, va puiser de l'eau dans un vase, la lui apporte et fait dessus le signe de la croix. Le pèlerin, en ayant goûté, en but à longs traits cette eau se trouvait changée en un vin délicieux. La nourriture qu'on lui assignait à la maison, elle y touchait rarement, mais réservait le tout pour quelque pauvre ou pour quelque malade. Elle avait un lit convenable, mais c'était pour y réchauffer les pauvres; pour elle, sa couche ordinaire était la terre ou une planche. Toutes les misères, corporelles ou spirituelles, excitaient en elle une tendre commisération. C'était l'usage, quand les magistrats devaient condamner à mort un criminel, de l'annoncer par le son des cloches. A ce signal la pauvre servante se mettait en prières avec larmes pendant trois ou quatre jours, quelquefois jusqu'à sept, pour obtenir au malheureux le salut de son âme. Cette commisération pour les condamnés à mort, elle la montra encore du haut du ciel. Un paysan du royaume de Naples, ayant été pendu pour un vol dont il était innocent, elle vint le dégager après l'exécution.
Douce, humble, soumise envers tout le monde, Zita était d'un courage intrépide à l'égard des libertins. Un des domestiques ayant voulu attenter à sa pudeur, elle lui déchira le visage avec ses ongles. Pour conserver ce précieux trésor, elle joignit une prière presque continuelle au jeûne et à la mortification. Elle sa levait à minuit, assistait à Matines dans l'église voisine de Saint Fridien, y priait avec larmes pour elle et pour les autres. Ces exercices de piété et de charité n'empêchaient point Zita de servir ses maîtres avec une ponctualité humble et affectueuse. Quand il leur arrivait de se fâcher contre elle ou d'autres personnes, elle se jetait à leurs pieds, quoique! n'y eût pas de sa faute, et leur demandait humblement pardon. Cette humilité, jointe à ses autres vertus, leur inspira pour elle une religieuse vénération. Cependant ils ne lui avaient pas toujours rendu justice on traita sa modestie de stupidité son exactitude à tous ses devoirs fut regardée comme le fruit d'un orgueil secret. La signora Fatinelli se laissa prévenir contre elle par les autres domestiques qui la détestaient son maître la honnissait au point qu'il ne pouvait la voir sans entrer dans de violents transports de fureur. Plus tard, quand ils eurent apprécié le trésor que possédait leur maison, ils lui confièrent le maniement de leurs affaires. Un mot de sa bouche suffisait pour calmer le signor Fatinelli dont l'humeur était fort emportée. Certes, la sainteté n'est pas toujours glorifiée en ce monde. Zita ne prévoyait pas que la sienne le serait autrement elle n'eût pas été sainte. C'est pourquoi elle fut toujours également humble et soumise.
Une nuit de Noël, qu'il faisait extrêmement froid, Zita se disposait à se rendre à Matines. Son maître lui dit: « Comment cours-tu à l'église par un temps si froid, que nous pouvons à peine nous en défendre ici avec tous nos vêtements? toi surtout, épuisée par le jeûne, vêtue si pauvrement, et qui vas t'asseoir sur un pavé de marbre? Ou bien reste ici pour vaquer à tes saintes oraisons, ou bien prends sur tes épaules mon manteau à fourrures pour te garantir du froid ». Zita, ne voulant pas manquer à un office aussi solennel, s'en allait avec le manteau, lorsque le maître lui dit, comme pressentant ce qui allait arriver: « Prends garde, Zita, que tu ne laisses le manteau à un autre, de peur que, s'il est perdu, je n'en souffre du préjudice, et toi, de grosses fâcheries de ma part ». Elle lui répondit: « Ne craignez pas, monsieur, votre manteau vous sera bien gardé ». Entrée dans l'église, elle aperçut un pauvre demi-nu, qui murmurait tout bas, et qui grelottait de froid. Emue de compassion, Zite s'approche et lui dit: « Qu'avez-vous, mon frère, et de quoi vous plaignez-vous? » Lui, la regardant d'un visage placide, étendit la main et toucha le manteau en question. Aussitôt Zita l'ôte de ses épaules, en revêt le pauvre et lui dit: « Tenez cette pelisse, mon frère, jusqu'à la fin de l'office, et vous me la rendrez n'allez nulle part, car je vous mènerai à la maison et vous chaufferai près du feu ». Cela dit, elle alla se mettre à l'endroit où elle priait d'ordinaire. Après l'office, et quand tout le monde fut sorti, elle chercha le pauvre partout, au dedans et au dehors de l'église, mais ne le trouva nulle part. Elle se disait en elle-même: « Où peut-il être allé? Je crains que quelqu'un ne lui ait pris le manteau, et que, de honte, il n'ose se présenter à mes yeux. Il paraissait assez honnête, et je ne crois pas qu'il ait voulu attraper le manteau et s'enfuir ». C'est ainsi qu'elle excusait pieusement le pauvre. Mais enfin, ne l'ayant pu trouver, elle revenait un peu honteuse, espérant toujours néanmoins que Dieu apaiserait son maître, ou inspirerait au pauvre de rapporter le manteau. Quand elle fut de retour à la maison, le maître lui dit des paroles très-dures, lui fit de vifs reproches. Elle ne répondit rien, mais, lui recommandant d'espérer, elle lui raconta comment la chose s'était passée. Il entrevit bien comment la chose s'était passée, mais ne laissa pas de murmurer jusqu'au dîner. A la troisième heure, voilà sur l'escalier de la maison un pauvre qui charmait tous les spectateurs par sa bonne mine, et qui, portant le manteau dans ses bras, le rendit à Zita, en la remerciant du bien qu'elle lui avait fait. Le maître voyait et entendait le pauvre. Il commençait, ainsi que Zita, à lui adresser la parole, lorsqu'il disparut comme un éclair, laissant dans leurs coeurs une joie inconnue et ineffable, qui les ravit longtemps d'admiration. On a cru que ce vieillard était un ange c'est pourquoi la porte de l'église où elle rencontra le pauvre au manteau a été depuis appelée la porte de l'ange.
Chaque vendredi elle allait en pèlerinage à San Angelo in Monte, à deux lieues de Lucques un jour qu'elle avait été retenue par les travaux de la maison plus que d'ordinaire, elle fut surprise par la nuit. Un cavalier qui suivait le même chemin lui prédit qu'elle périrait dans les précipices si elle continuait à marcher au milieu des ténèbres mais quand il arriva, il fut bien saisi de trouver à la porte de l'église celle qu'il croyait avoir laissé loin derrière lui. Sainte Zita avait un grand amour pour sainte Marie-Madeleine et pour saint Jean l'Evangéliste une veille de fête de la première, elle voulut aller faire brûler un cierge devant son autel dans une église assez, éloignée de Lucques. Elle arriva tard et trouva les portes fermées elle alluma son cierge, se mit à genoux et s'endormit. La nuit, un orage terrible s'éleva, la pluie tomba par torrents, et la Sainte reposait: quand elle se réveilla, les rues étaient couvertes d'eau, mais elle n'avait pas même été touchée par une goutte de pluie, et son cierge brûlait encore. Les portes alors s'ouvrirent devant elle, et quand le curé arriva pour dire la messe, il trouva la Sainte en prières dans cette église qui n'avait pas été ouverte depuis la veille au soir. Nous pourrions rapporter beaucoup de faits semblables, ils serviraient à prouver de plus en plus la protection toute particulière dont le ciel entourait sa servante. Ses dernières années se passèrent dans une prière et une extase presque continuelles. Elle mourut âgée de soixante ans, le 27 avril 1278, après avoir reçu les derniers Sacrements avec une ferveur extraordinaire elle n'avait servi qu'un seul maître. Aussitôt qu'elle eut rendu le dernier soupir, une étoile brillante parut au-dessus de la maison où reposait son corps, et les enfants se mirent à crier dans les rues la Sainte est morte, allons voir la Sainte dans la maison de Fatinelli. Toute la ville vint rendre hommage à la vertu de l'honorable servante que Dieu venait de glorifier en la rappelant à lui.
Les miracles se multiplièrent tellement au tombeau de sainte Zita, que, quatre ans après sa mort, l'évêque permettait qu'on l'honorât d'un culte public. Ce culte s'est rapidement répandu et dans sa patrie et dans toute l'Europe. Le cercueil de sainte Zita fut ouvert par trois fois différentes en 1446,1581,1652, et on trouva le corps qu'il renfermait parfaitement intact: il était encore en 1841 dans un état parfait de conservation, tel que les Bollandistes le décrivaient dans les Acta Sanctorum au XVIIe siècle: il est enchâssé et gardé avec beaucoup de respect dans l'église Saint Frigidien. En 16S6, Innocent XII a consacré le culte qu'on rendait à sainte Zita et publié un décret de béatification. On lui donne pour attributs un trousseau de clefs suspendu à sa ceinture et une cruche les clefs rappellent qu'elle fut investie de la confiance de ses maîtres après avoir été l'objet de leurs mauvais traitements, et la, cruche, le miracle qu'elle fit de changer l'eau en vin au bénéfice des pauvres. On montre encore à Lucques le puits où elle prit de l'eau pour faire ce miracle. On l'a aussi représentée debout devant les portes de la ville, et la sainte Vierge venant lui ouvrir le guichet. La miséricordieuse Marie dut rendre ce service à sa servante un soir que celle-ci s'était attardée à ses bonnes oeuvres. Une bonne vieille gravure allemande, que nous avons sous les yeux, la représente sous les traits d'une jeune fille accorte, revêtant le vieillard de la pelisse de son maître. Sainte Zita est la patronne de Lucques elle l'était aussi de toute la république de ce nom, quand elle existait. Les servantes et les femmes de charge l'invoquent comme leur modèle et leur particulière protectrice. De la chaumière du mont Sagrati, qui avait abrité le berceau de l'humble Sainte, on a fait une chapelle qui lui est dédiée. On a recueilli plusieurs maximes spirituelles de sainte Zita en voici deux qui, tout en exprimant des vérités connues, les mettent parfaitement en relief: « Une servante paresseuse, disait-elle, ne doit pas être appelée pieuse; une personne de notre condition, qui affecte d'être pieuse, sans être essentiellement laborieuse, n'a qu'une fausse piété ». « Travailler, c'est prier », disait-elle encore souvent. Terminons par cet éloge de l'un de ses historiens: « Zite avait la piété des Saints, qui ne se contente pas de quelques pratiques extérieures, mais qui pénètre les profondeurs de l'âme. Elle n'était pas de celles qui sont plus promptes à prier qu'à pardonner; à aller à l'église, qu'à vaquer aux devoirs de leur état à donner une aumône qu'à réprimer leur langue ou à dompter leurs passions ».
Texte extrait des Petits Bollandistes, volume 5
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