Spiritualité Chrétienne

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Sur les pas de Saint François et de Sainte Claire d'Assise

 Sur les pas de Saint François et de Sainte Claire d’Assise

Région d’Assise – Ombrie Italie


A travers les lieux où vécu et passa le Poverello d’Assise, nous allons pèleriner sur ce qui furent les lieux dans lesquels Saint François a passé , et à travers lesquels la spiritualité évangélique Franciscaine à prit ses racines. Tout en méditant, laissons-nous imprégner par la spiritualité et l’exemple de Frère François, image vivante de Jésus…

Agenouillé dans la petite église délabrée, le jeune homme priait devant un grand crucifix peint. Les yeux ouverts, le corps droit comme on le représentait au XIIe siècle, le Christ montrait Sa Divinité et Sa Victoire sur la mort, mais son regard exprimait aussi une infinie bonté. Soudain , une voix se fait entendre: « François, va et répare Ma Maison qui tombe en ruine. » Sur le moment, François comprit « Mon église » et non pas « Mon Eglise », et il restaura le petit sanctuaire. Mais le feu de son amour pour le Seigneur Jésus devait bientôt enflammer toute la terre….

Saint Damien, tout à l’extrémité d’Assise, est le lieu où, à l’âge de 24 ans, en 1206, Saint François reçut sa vocation. C’est là qu’il conduisit Sainte Claire en 1211 et que débuta l’Ordre des Pauvre Dames. Dans le petit chœur, l’oratoire, le dortoir, le réfectoire, on imagine bien la vie des premières clarisses. Au procès de Canonisation de Sainte Claire, Sœur Amata témoignera: « Lorsque Claire revenait de l’oraison, son visage paraissait plus clair et plus beau que le soleil. » En 1240, les Soudards Musulmans de l’Empereur Fréderic II avaient déjàpénétré dans le cloître minusculelorsque Claire s’y fait transporter sa civière d’infirme, avec le ciboire sorti du tabernacle, et les mit en fuite, sauvant ses sœurs et la ville d’Assise de ce fléau.

Saint Damien est aujourd’hui occupé par les Frères Mineurs, car après la Canonisation de Claire, ses compagnes s’installèrent au centre d’Assise dans l’église qui porte son nom. C’est dans ce jardin d’oliviers que François composa en 1225, un an avant sa mort, l’inoubliable Cantique des Créatures : « Loué sois-tu mon Seigneur , avec toutes tes créatures, spécialement messire, frère Soleil… »

L’admirable crucifix fut emporté par les Sœurs à la Basilique Sainte Claire où il est vénéré dans la Chapelle du Saint Sacrement. Dans le cœur trône un autre crucifix, du XIIIe siècle donc postérieur à Saint François , qui démontre l’inffluence qu’eût celui-ci sur l’art de son époque : jamais avant lui on n’avait représenté le Christ souffrant sur la Croix, le corps tordu de douleur. François d’Assise , qui vivait dans son corps les souffrances de la Passion, a pour la première fois attiré l’attention des artistes sur l’humanité du Christ.

A la Basilique Saint François bat le cœur d’Assise. La première pierre fut posée par le Pape Grégoire IX, grand ami de François, au moment de sa Canonisation. Lors du meurtrier sésime de septembre 1997, ou deux francsiscains (le maître des novices et un très jeune postulant) furent tués par une l’effondrement d’une partie de la voûte de la Basilique supérieure, le pire du point de vue des œuvres d’art a été évité : les inestimables fresques de Giotto ont subsisté : John Pole et moi-même avons eu le privilège d’être les derniers à les photographier, à peine quelques semaines avant la catastrophe ; l’acceuil des Franciscains, le travail de nuit dans la Basilique en leur comapgnie, face à ces chefs d’œuvres, sont pour nous des moments inoubliables. Ila falllu patienter juusqu’à Noël 2000 pour les revoir. Les principaux épisodes de la vie de François y sont retracés par ce peintre de génie dont ses contemporains dirent « qu’il fit passer de l’art de peindre du grec au latin » (de la peinture byzantinante à un style proprement italien et florentin. Le Don du manteau, la Renonciation aux biens paternels, la Nuit de Noël à Greccio, la Mort du Chevalier Celano, le Sermontdevant le Pape, l’Apparition au Chapitre d’Arles, sont immortalisées de manière inoubliables.

Le goût des volumes et la simplification des lignes géométriques, un sens scultural de la monumentalité dans l’espace, le désir savoureux bien caractéristique du réalisme médiéval, carctérisent cet artiste immense. Les visages ont une pureté de lignes et une noblesse extraordinaire (comment oublier la beauté de François dans le Don du manteau ou la Renonciation aux biens, le feu de son regard dans le songe d’Innocent III. L’analyse psychologique chez Giotto est fine et savoureuse (la fureur mal contenue du père Bernadone, les cris effarés des convives du chevalier de Celano, la chorale des Franciscains s’époumonant de tout leur cœur à chanter pendant la Messe de minuit à Greccio…)

La Basilique Inférieure, moins célèbre, recèle pourtant un trésor en fresques : Cimabue ( la Madone aux Anges comporte un portrait authentique de Saint François, peint très peu après sa mort), le maître de San Francesco (XIIIe siècle) , les allégories franciscaines, par l’atelier de Giotto, Simone Martini sur la vie de Saint Martin et les saints Franciscains, Pietro Lorenzetti sur la vie du Christ (deux grands siennois du XIVe siécle)

La crypte nous invite à prier sur le tombeau du Poverello et de ses quatre plus chers compagnons : Frère Léon (« Petite Brebis »), Rufin, (Cousin de Sainte Claire), Ange et Massée.

A la Cathédrale Saint Ruffin d’Assise, on peut voir les fonts baptismaux de François et de Claire. C’est ici que l’Archevêque remit lui-même un branche de buis à la jeune Claire plongée dans sa prière en la fête des Rameaux. La maison de Claire, d’où elle s’enfuit pour rejoindre les Frères Mineurs, s’élevait sur la place même de la Cathédrale.

Le quartier de la Piazza del Commune, cœur de la vie sociale d’Assise, était le royaume du jeune François ; Il a connu le beau temple de Minerve, transformé en église. Par le Corso Mazzini, on accède à San Francesco Piccolino (saint François Tout-Petit) ; cet oratoire est l’écurie, où la mère de François, Donna Pica, malgré sa fortune, a tenu par piété à le mettre au monde, ce qui configurait déjà son fils au Christ. Non loin de là, la Chiesa Nuova conserve le débarras où le père furieux enfermait François au début de sa conversion, et dont la mère le délivrait dès que son mari avait le dos tourné ; près du 2e pilier gauche, on accède aux vestiges de la maison paternelle. La ruelle qui longe l’église sur la gauche nous montre la boutique d’étoffe de Pietro Bernadone

Juste au sud d’Assise, la Basilique de Rivorto renferme l’humble cabane en pierre qui servit d’asile à François et ses premiers compagnons. Ils en furent chassés par un paysan qui prétendait y loger son âne. C’est alors qu’il se réfugièrent à la Portioncule. La minuscule petite église est coiffée par l’immense Basilique Sainte Marie des Anges, Maison-Mères des Francisacins, dont la coupole blanche se distingue des hauteurs d’Assise. C’est ici qu’il apprivoisa « sœur cigale » et la « brebis dévote », et qu’eu lieu le fameux Chapitre des Nattes en 1219, où plus de 5000 frères se réunirent plusieurs jours dans un recceuillement et un silence édifiant. Parmi eux se trouvait Saint Antoine de Pasoue. Saint Dominique, dit-on ; Fondateurs des Frères Prêcheurs, l’autre Odre Mendiant du XIIIe siècle, y serait venu et y aurait rencontré François.

A mi-chemin entre Assise et Sainte Marie des Anges se trouvait une léproserie. C’est ici que s’est passé le baiser au lépreux, un des moments clè de la conversion de François. C’est de ce même lieu qu’il donna sa dernière bénédiction de la ville d’Assise avant de mourir : « Bénie sois-tu cité de Dieu, cité sainte, car par toi beaucoup d’âmes seront sauvées, et en toi habiteront beaucoup de serviteurs de Dieu. »

Noyé dans la verdure sur les hauteurs d’Assise, au dessus de la Roca Maggiore (la forteresse), les Carceri (prisons) sont l’un des ermitages dont François jalonna l’Ombrie et la Toscane, pour permettre aux Frères de se retirer loin du monde en très petite communauté, après les missions de prédication. Leur nombre ne devait pas dépasser trois ou quatre, dont deux devaient , par roulement, jouer le rôle de « mère », au service des autres. Lui-même s’y abîmait dans la prière « comme dans un havre bien abrité, et s’anéantissait alors dans la contemplation des Plaies du Sauveur. »

Pérouse (Perugia) est la capitale de l’Ombrie, la jumelle ennemie d’Assise. Perouse la gelfe (pour le Pape), Assise la gibeline (pour l’empereur). Le jeune François après avoir guerroyé contre les pérugins, y est resté un an prisonnier. Plus que pour les souvenirs Franciscains, quasi inexistants à part le délicieux oratoire de Saint Bernardin, ce sont les trésors d’art qui y retiennent . Le Palais des Prieurs a survécu au tremblement de terre bien que ses murs du XIIIe siècles aient été ébranlés et doivent désormais être cerclés de fer. Il abrite dans ses salles gothiques la Galerie nationale de l’Ombrie, un des plus élégants musées d’Italie dont les deux principaux trésors sont l’admirable Madone à l’enfant du Bienheureux Fra Angelico avec l’Annonciation par Piero della Francesca.

Au lac Trasimène François joua avec Frère Poisson, et il passa tout un carême à jeûner sur l’Isola Maggiore. Gubbio, au nord d’Assise, est immortalisée par le loup que Saint François y a apprivoisé : « Le loup, s’agenouilla, inclina la tête et, par de doux mouvements du corps, de la quaue et des oreilles, montra vouloir oberver le paxte. » L’église de Vittoria, à l’entrée de la ville garde le souvenir de cet événement. Dans la ville haute, le Palais des Consuls dresse sa haute façade dissymétrique et ses fiers crénaux guelfes du XIVe siècle. Toutes ces villes sont de véritables belvédères d’où on peut contempler la campagne ombrienne.

A Lugnano in Teverina, dans cette haute vallée du Tibre si pittoresque, Saint François, prêchant devant l’église, aperçut un loup qui emportait un enfant au dernier rang. Pour ne pas s’interrompre, il chargea mentalemement un canard d’aller pncer le loup et lui intimer l’ordre de ramener l’enfant sain et sauf… L’église est un bijou roman qui méite largemement le détour. Ne ratez pas, à l’intérieur, un chapiteau représentant une messe byzantine.

Au sud d’Assise, mainte cité médiévale garde le souvenir des passages du Saint. Foligno, au campanile durement touché par le tremblement de terre, où le jeune François vendit un cheval et un ballot d’étoffes appartenant à son père, pour offrir la somme d’argent au curé de Saint Damien ; l’Abbaye de Sassovivo et son cloître aux élégantes colonnettes, aujourd’hui habitée par les Petits Frères de Jésus. Spello et ses rues en pentes (à Santa Maria Maggiore, la Chapelle Baglioni possède d’éclatantes fresques de Pinturicchio). A Bevagna, la place avec sa fontaine et son église romane est un vrai concentré de l’Italie. Tout près, la très célèbre Prédication aux oiseaux s’est déroulée au lieu dit Pian d’Arca, où Saint François institua le Tiers Ordre. Montefalco, le « balcon de l’Ombrie », possède une église San Francesco dont les fresques racontant la vie de Saint François, si différentes de celles de Giotto, dégagent un charme puissant. Après être passés au large de Trevi, la plus harmonieuse de toutes ces bourgades perchées, et nous être reposés près des idylliques sources de Clitumne et du petit temple du dieu-fleuve, la route nous dépose au pied de spolète, où François eut un songe dans sa jeunesse, qui lui fit comprendre qu’ilavait mal intreprété le songe du palais en armes qu’il avait reçu à Pérouse : il renonca à partir en Pouille guerriyer, et rentra à Assise où il allait bientôt se convertir. Le formidable Ponte dei Torri, dont les dix arches en plein cintres tracent un gigantesque trait d’union entre deux montagnes (il arracha des cris d’admiration à Gœuthe) et la façade romane aux étranges sculptures de San Pietro, le duomo avec sa mosaïque byzantine en façade peinte par Filippo Lippi : tout ici est d’une beauté radicale et hors du commun. Sur la route de Monteluco, l’Abbaye San Guilano hebergea plusieurs fois l’infatigable marcheur de Dieu. La Valnerina, sauvage vallée parllèle à cette route, réserve des joies rares : l’Abbaye romane San Pietro in Valle et ses fresques dans un écrin de verdure, Ferntillo et son double château fort verrouillant la vallée.

Avec les ermitages de la « Vallée Sainte » autour de Rieti, nous plongeons beaucoup plus profondément au cœur même de la spiritualité Franciscaine : l’union à Dieu dans la plus totale pauvreté. Chacun est admirablement situé, perdu dans la verdure. Les deux plus beaux sites sont Greccio, agrafé à sa falaise où, par une nuit bénie de Noël 1223, Saint François y créa la première crèche; c’est le « Bethléem Franciscain »; et Poggio Bustone, que François traversait en saluant les villageois: « Buon giorno, buona gente » (bonjour, bonnes gens !). De l’ermitage, la vue sur le bour et le lac de Pediluco est inoubiable; ici il envoya en mission les premiers Frères. A la Foresta, il multiplia les récoltes d’un Prêtre, c’est le « Cana Franciscain », à Fonte Colombo il fut cautérisé à la fin de sa vie, presque aveugle, pour ses intolérables maux d’yeux et il amadoua « Frère Feu ». Il y rédigea aussi la « Seconde Règle de l’Ordre », celle qui est toujours en usage dasn les communautés Francisaines à travers le monde: c’est le « Sinaï Franciscain ». A Rieti, François entendit l’angélique concert de la cithare céleste et rendit sa liberté à une poule d’eau.

Plus à l’ouest, vers Narni, le Sacro Speco di Sant’Urbano - le « Cana Franciscain » - est peut-être le plus authentiquement préservé des ermitages.

On reste confondu devant les distances que Saint François parcourut à pied. Nous nous acheminons vers un sommet, la Verna (l’Alverne) au sud de la Toscane. Au couvent de Montecasale, le saint convertit des brigands qui entrèrent dans l’Ordre. A la Verna )1130 mètres), l’émotion nous étreint. Apres lieux, âpre ravin où le Diable tentait de précépiter François, âre rocher diont il faisait sa couche. En ces lieux sauvages et particulièrement déserts, un fidèle ami: un faucon, « Frère Faucon », qui le réveillait quand il devait faire oraison, et le laissait dormir quand il était trop épuisé, sur ordre de Dieu. Le 14 septembre 1224, en la fête de la Sainte Croix, un Séraphin Crucifié, dans une grande lumière; de ses cinq plaies dardent des rayons; une fulgurante douleur: François est stigmatisé, définitivement et totalement configué au Seigneur. Le 30 septembre suivant, pressentant qu’il ne reviendait plus en ces lieux, il fit des adieux bouleversants à son cher Alverne: « Je m’en vais, adieu, adieu, adieu, adieu, montagne, adieu, Mont Alverne, adieu, Montagne des Anges! Adieu, très cher Frère Faucon: je te remercie de la charité dont tu as fait preuve à mon égard. Adieu, rocher à pic, je ne reviendai plus te visiter. Adieu, rocher, jamais plsu nous ne nous reverrons. »

Il ne lui reste plus qu’à se préparer à rencontrer Dieu face à Face. Ce qui eut lieu à la Portioncule, le 3 octobre 1226. Le Seigneur accorda une dernière consolation à son serviteur: Jacqueline de Settesoli, une noble dame romaine, grande amie et bienfaitrice de François qui l’appelait affectuesemement « Frère Jacqueline », miraculeusement prévenue, arriva au moment même où l’on pensait à lui envoyer un courrier, en apportant tout ce que le Saint désirait sans l’avoir dit à qui que ce soit.

Saint François mourut en chantant un psaume, et en disant joyeusement: « Que ma sœur la mort soit la bienvenue. » « Alors les alouettes, qui pourtant sont amies de la lumières et ont en horreur l’obscurité du crépuscule, arrivèrent par bandes entières au-dessus de la maison où trépassait le Saint, alors que la nuit tombait déjà; elles tournoyèrent longtemps et, chantant à tue-tête, rendaient ainsi un éclantant et joyeux témoignage à la gloire du Saint qui les avait si souvent conviées à louer Dieu. »


Marie Gabrielle Leblanc

 

Texte paru sous le Titre « Sur les pas du Petit Pauvre », dans le magazine France Catholique N° 2819 du 18 janvier 2002.

 



19/04/2008
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