Sainte Rosalie de Palerme, deuxième partie
Sainte Rosalie de Palerme, suite
10 Honneurs rendus à Sainte Rosalie
La mort de Rosalie arriva le 4 Septembre et aussitôt le bruit s'en répandit dans toute la ville, alors la foule se précipita vers la montagne suivant les indications de quelques âmes pieuses; et bien qu'il n'y eut aucun chemin tracé et qu'il fallut traverser plusieurs endroits au péril de ses jours et gravir une pente rapide souvent suspendue sur des abimes effrayants, quelques uns des plus zélés arrivèrent au sommet et finirent par découvrir la retraite de la Sainte. Cependant quelques recherches qu'ils firent ils ne purent trouver aucun vestige de sa sépulture. Cotte circonstance n'empêcha pas les témoignages de la dévotion. Les magistrats de la ville firent construire un sentier, ils établirent un sanctuaire dans la caverne, ils en confièrent la garde à de pieux religieux, et le concours devint universel. Alors on recueillit toutes les circonstances qui se rapportaient à une vie si extraordinaire; son départ de la Cour, son séjour à Montréal, et ensuite à Quisquine et enfin sa dernière retraite sur cette montagne inaccessible. Dès ce moment des prodiges et des guérisons merveilleuses eurent lieu,qui déterminèrent vers 1180 le Pape Alexandre III à établir sa fête pour l'église de Palerme, de plus sa légende fut introduite au Bréviaire, son invocation aux litanies des Saints, et des sanctuaires furent érigés en son nom à Palerme, à Messine, à Agrigente et autres localités. Une particularité tout à fait frappante, c'est le grand nombre d'images de la Sainte qui furent publiées après sa mort, les unes reproduisant ses traits, les autres retraçant les faits principaux de sa vie ; cette circonstance est remarquée par les auteurs qui se sont occupés d'elle, et l'on ne peut citer beaucoup de Saints qui ont été l'objet de tant de reproductions; enfin nous devons attacher beaucoup d'importance à ce fait parce que c'est par ce moyen que sa légende a pu être rappelée de l'oubli, ainsi que nous le dirons plus tard. Nous avons déjà parlé de plusieurs de ces reproductions, nous allons en citer d'autres qui nous donnent des renseignement précieux, sur la croyance des populations, à l'égard de son heureux passage à une vie meilleure.
Dans la chapelle d'un Prince de Léon Forte, très dévot à notre sainte, on pouvait voir un tableau, représentant l'assomption de la Sainte; elle traverse les nuages, couronnée de fleurs, et portant des vêtements de gloire, un Ange la conduit par la main, et d'autres anges l'accueillent du haut du Ciel, et célèbrent son triomphe. Cette peinture citée par le P. Cassini doit être très ancienne, elle a tous les caractères d'une œuvre antérieure au XIIIe. siècle, ce qui nous témoigne de la croyance des temps qui c'est immédiatement suivi sa mort. Dans l'Eglise principale de Bivone qui appartenait à sa famille, l'on voit un bas-relief représentant l'assomption de la Sainte; elle est assise sur un trône, surmonté de pinacles sculptés et dorés, son livre de prière à la main, couronnée d'une auréole éclatante, un rameau de rosier à la main, et de chaque côté, l'on voit des anges qui viennent lui offrir des corbeilles de fleurs, emblèmes de sa gloire dans le ciel. Dans un autre relief, que l'on trouve dans une antique Eglise élevée en son honneur, et portant son nom à Bivona; on la voit à genoux aux pieds de Jésus et de Marie, l'enfant Jésus la couronne d'un diadème d'or. La Sainte Vierge tient une belle rose épanouie, qui est comme le symbole des mérites de notre Sainte: à droite et à gauche du trône de Marie, l'on voit les grands patrons de l'Eglise, Saint Pierre et Saint Paul, qui contemplent Rosalie avec complaisance, tandis qu'au dessus du trône orné d'un dais à franges d'or, l'on voit la cour des Anges portant les palmes de la victoire, et célébrant son triomphe avec des instruments de musique. Enfin dans le grand vestibule de l'hôpital de la ville de Palerme, l'on voit un tableau qui rappelé les secours qu'elle a donnés plusieurs fois à cette cité, en la préservant des ravages de la peste, le tableau étant très ancien et appartenant au XIIIe. ou XIVe. siècle, nous montre la confiance que l'on avait dès ce temps, dans la protection de la Sainte. Il représente toute la ville de Palerme, bâtie en cercle autour de la grande rade qui lui sert d'entrée, la mer est couverte de vaisseaux pavoises. On peut reconnaître les tours qui défendaient les approches du port, les deux grandes rues qui, en se coupant à l'angle droit, la divisaient en quatre quartiers égaux, les murs et les fortifications qui l'entouraient, le Mont Pellegrino qui la dominait vers la droite; on peut distinguer le Palais du Roi, la cathédrale et autres édifices principaux. Dans le lointain on voit l'Eglise de Montréal et enfin au-dessus dans le ciel on voit les quatre vierges patronnes de Palerme, Sainte Agathe, Sainte Nymphée, Sainte Christine, Sainte Oliva, et au milieu d'elles Sainte Rosalie les mains jointes et invoquant le Seigneur pour ses compatriotes affligés.
11 Le temps d'oubli
Mais par une permission de la divine Providence, il arriva que celle qui avait toujours recherché, une vie ignorée et cachée, après l'éclat d'une gloire si méritée par sa vertu et ses prodiges rencontra l'oubli de ses concitoyens comblés de ses bienfaits. Avec la suite des siècles, la dévotion envers Rosalie s'affaiblit,les pèlerinages diminuèrent, le recours à la grande sainte devint de plus en plus rare,et tandis que toute l'Eglise acclamait de nouveaux noms tout éclatants de mérites et de gloire comme Saint François d'Assise, Saint Dominique, Sainte Elisabeth de Hongrie, Sainte Rose de Viterbe, les Palermitains les accueillirent avec admiration, bâtirent des sanctuaires, des couvents en leur honneur, favorisèrent ces nouvelles familles religieuses par tous les moyens, mais en même temps celle qui était la gloire de leur patrie, leur patronne spéciale, leur protectrice si dévouée tomba dans un tel oubli, que les autorités religieuses ne crurent plus devoir exposer à la dévotion des fidèles un nom qui semblait ne plus rappeler de souvenir et peu à peu les nouvelles litanies ne reproduisirent plus son nom, son office fut retranché du bréviaire, et enfin sa fête ne fut plus célébrée dans sa ville natale. C'est par suite de ces circonstances, que le sanctuaire du Mont Pellegrino étant tombé en ruines ne fut pas rétabli, le sentier se remplit de pierres et de ronces et ne fut pas fréquenté et même son église dans Palerme finit par être placée sous un nouveau nom. Tous ces changements prirent place à partir du XIIIe. siècle. Ceci a pu arriver sans doute pour différentes causes, soit parce que l'apparition de Saints extraordinaires, fondateurs d'ordres ou réformateurs attira exclusivement toute l'attention, soit, ainsi que le dit Pierre de Salerne, par une permission de Dieu qui désirait, pendant ce temps, laisser le champ libre aux nouvelles œuvres, mais qui ensuite, voulait qu'après une interruption, le culte de Rosalie reparut plus brillant que jamais. Ainsi en est-il dans les destinées de l'Eglise, et dans les destinées de chaque âme en particulier, il y a des moments de ténèbres suivis de lumière, il y a des moments d'épreuves douloureuses et puis de consolations, il y a des angoisses de tristesse suivis d'impressions de joie qui se font sentir d'autant plus vivement h l'âme, quand elles succèdent à la tempête. Ainsi en fut-il pour les quelques rares dévots de Sainte Rosalie, qui pouvaient gémir de voir la dévotion de leurs ancêtres, comme à jamais obscurcie dans les cœurs.
12 Découverte du corps de Sainte Rosalie
Pendant plus de deux siècles, le souvenir de Rosalie sembla effacé même en son pays natal, et il en fut ainsi jusqu'au jour où le Seigneur voulut le faire briller d'une gloire encore plus grande, que celle qu'il avait eu dans les commencements de son exaltation. Au commencement du XVIIe siècle, l'Eglise avait passé dans deux grandes épreuves. Les enseignements du Sauveur avaient rencontré des adversaires implacables. Des nations entières s'étaient laissé aveugler par l'erreur, peut-être qu'elles recevaient ainsi le châtiment de leur infidélité dans le service de Dieu. Les nouvelles erreurs attaquaient par de vains raisonnements tout ce qui dans la religion semblait dépasser les vues d'une lumière humaine, telles que la société de Notre Seigneur au milieu des fidèles sous les voiles eucharistiques, l'intervention des saints du ciel en faveur de leurs frères sur la terre, la puissance des prières pour les âmes souffrantes. Ainsi l'on divisait l'Eglise en lambeaux pour la détruire; on séparait les nations chrétiennes de leur centre, et de plus on cherchait à briser les liens qui l'unissaient à l'Eglise souffrante et à l'Eglise triomphante; on attaquait cette relation des âmes qui faisait toute leur puissance, la communion de l'Eglise avec Notre Seigneur au Très Saint Sacrement, et la communion de l'Eglise aux prières des Saints dans le ciel, et aux besoins des âmes souffrantes dans le purgatoire. Alors le Seigneur prit plusieurs moyens puissants, pour combattre ces attaques, et en particulier il voulut choisir Palerme pour donner un exemple éclatant de la confiance des fidèles dans les heureux citoyens du ciel, et de la puissance de ceux-ci pour leurs frères bien aimés de la terre.
Les temps fixés par la miséricorde céleste étant venus, il arriva qu'une pauvre malade succombant sous ses infirmités et condamnée par tous les médecins dans le grand hôpital de Palerme, vit la nuit pendant son sommeil une jeune fille resplendissante de clarté, s'approcher de son lit et l'assurer qu'elle serait guérie si elle invoquait Rosalie et si elle promettait de se rendre après sa guérison au Mont Pellegrino, pour y prier dans le sanctuaire. La malade fit l'invocation qui lui avait été conseillée, et à la surprise de tous, elle entra en voie de guérison. Pierre de Salerne nous rapportant qu'elle différa l'exécution de son vœu, fait remarquer comme souvent on est peu reconnaissant des grâces qu'on a le plus ardemment désirées. Enfin la malade au bout d'un an songea à se rendre au Mont Pellegrino, et là s'étant assoupie, elle revit en songe la même jeune fille, qui lui recommanda de faire chercher dans la caverne le corps de Sainte Rosalie. Quelques citoyens pleins de piété, ayant connu ces faits, résolurent d'entreprendre ces recherches; on a conservé les noms de trois d'entre eux: Vito Amodeo, Jacques de Gènes et Jean Torentino. Ils se rendirent à la grotte de Sainte Rosalie, et commencèrent des fouilles, dans lesquelles ils furent encouragés par différentes apparitions de la Sainte, mais comme ils ne trouvaient rien, il est possible qu'ils eussent abandonné leurs tentatives, si des circonstances extraordinaires n'étaient venues fortifier leur courage. En ce moment la peste fut apportée dans le port de Palerme, par l'arrivée de quelques vaisseaux du Levant; elle fit de nombreuses victimes. Malgré toutes les précautions le fléau augmentant de jour en jour, l'Archevêque de Palerme, le pieux Cardinal Doria, recommanda instamment de recourir aux secours célestes. Il pourvut aux besoins soins rituels des malades, fit ouvrir tous les hôpitaux, multiplia l'administration des sacrements et enfin décréta l'adoration des quarante heures dans les Eglises. Toutes les communautés furent invitées à s'en aller dans des habits de deuil à l'Eglise Métropolitaine, portant les reliques des Saintes Christine et Nymphée, patronnes de la cité. Or il arriva dans la procession un fait extraordinaire, c'est que dans le chant des Litanies, deux chœurs de chantres, qui étaient séparés dans le cortège par un grand intervalle, sans s'être concertés à l'avance eurent l'idée d'ajouter au chant des litanies l'ancienne invocation à Sainte Rosalie tombée depuis longtemps en désuétude. Cette invocation à laquelle l'on n'était plus habitué, surprit tous les esprits, mais la surprise fut encore plus grande lorsqu'on sut que ces deux chœurs de chantres qui n'avaient pu se concerter à l'avance, avaient eu en même temps l'inspiration de la faire entendre. Or, il y avait déjà cinquante jours que les travailleurs cherchaient sans résultats les restes de Sainte Rosalie, mais ce qu'ils apprirent de l'invocation du nom de la Sainte redoubla leur courage et ayant continué à creuser dans la caverne à l'endroit qui avait été indiqué par l'apparition que nous avons rapportée, ils finirent par trouver à une grande profondeur un immense rocher d'un seul bloc, qui semblait devoir arrêter tous leurs efforts, qu'ils continuèrent néanmoins. Enfin aux première jour de Juillet, quelle fut leur joie lorsqu'ils découvrirent sous le rocher, le crâne et la chevelure de la sainte; ils continuèrent leur travail, tandis qu'un parfum des plus doux sortait de cette antre, et ils finirent par découvrir le corps toute entier.
Aussitôt la nouvelle s'en répand dans toute la ville qui éclate en actions de grâce, Rosalie est invoquée comme protectrice de la ville, et le Gouverneur Philibert, fils du duc de Savoie donne des ordres pour que le saint corps soit aussitôt transporté dans son palais. L'espérance rentre dans tous les cœurs et la certitude de la délivrance se répand partout,lorsqu'on apprend d'instants en instants que des malades ont été guéris par le seul attouchement des saintes reliques, ou par les eaux des sources qui coulent dans la caverne. Il est incroyable, dit Pierre de Salerne, avec quelle rapidité la nouvelle de l'invention du corps se répandit par toute la ville, avec quelle gratitude elle fut accueillie, avec quelle joie elle fut célébrée. Tout le monde s'écriait que leur jeune compatriote allait encore les délivrer de la peste, ils en remercièrent Dieu qui frappe et qui guérit, qui suscite les guerres et amène la paix, qui inflige des châtiments, qui accorde la délivrance ; qui place les antidotes à côté des poisons, et des roses sur les arbrisseaux qui portent les épines. Alors des quantités de citoyens se rendent au Mont Pellegrino, visitent la caverne, se partagent les pierres qui avaient été arrachées des entrailles de la montagne et les estiment aussi précieuses que des pierreries, ils rapportent de la poussière de la caverne et de l'eau des fontaines qui descendent du sommet. Les anciennes images de la jeune Vierge sont aussitôt reproduites, répandues par milliers dans la ville, on les attache dans les demeures et aux portes pour arrêter le fléau. Les sénateurs et la municipalité s' associant à ce mouvement et pleins de sollicitude se réunissent pour décréter qu'ils choisissent Sainte Rosalie comme patronne de la ville; ils décrètent aussi une somme considérable pour élever une chasse magnifique, de quinze cents livres pesant, d'argent massif, qui devra être portée au moins chaque année dans une procession solennelle, puis reposée dans une chapelle nouvelle, qu'ils veulent élever et orner dans la basilique principale. Cependant le fléau continuait ses ravages et le vice Roi lui-même, Philibert Emmanuel, est atteint et succombe en quelques jours. Les âmes pieuse s'inquiétèrent et firent entendre leurs plaintes, elles firent observer que les témoignages de dévotion envers la sainte s'étaient ralentis; que les promesses qui avaient été faites, n'avaient pas été réalisées, et qu'on avait trop retardé de mettre à exécution l'intention qui avait été manifestée de transporter le corps de la sainte, au milieu de la ville désolée par le fléau. Alors le clergé et les magistrats se réunissent de nouveau, et l'autorité fixe un jour pour transporter solennellement ces précieux restes, et enfin les sénateurs présents à cette détermination confirment ce qu'ils avaient promis; c'est-à-dire, de faire construire une chasse précieuse et pour la recevoir, d'élever dans la cathédrale, une chapelle décorée aussi magnifiquement que possible.
13 Processions solennelle en l'honneur de la Sainte
La dévotion des fidèles était excitée de jour en jour par l'intensité du fléau, et c'est au milieu de ces alarmes,que des préparatifs immenses furent faits, tels qu'on n'en vit peut-être jamais de plus grands dans aucune circonstance; nous ne pouvons donc passer sous silence, un fait si glorieux pour la mémoire de la jeune sainte. Sur le parcours, cinq Arches de triomphes furent élevés qui rivalisaient de magnificence; le plus beau,couta près de 16,000 louis; il était composé d'un massif a plusieurs étages ayant 4 arcades,et était entièrement revêtu de tapisseries de soie, les attiques étaient supportées par cinquante colonnes aux chapiteaux admirablement sculptés et étincelants d'or; dans de riches niches remplies d'étoffes de prix, l'on voyait quarante statues et une multitude innombrables de vases précieux et de candélabres; sa hauteur dépassait les plus grands édifices de la ville, et il était encore surmonté de mats, ornés de couronnes, de torsades, de banderoles et d'étendards. De plus on éleva sur le parcours, 33 autels d'une grande hauteur, chargés de la base au sommet de statues, de cierges et de vases précieux en or et en argent, en même temps les citoyens décorèrent leurs maisons de tentures de draperies et de tout ce qu'ils avaient de plus riche chez eux. Les rues étaient ornées d'une quantité innombrable de lustres et de flambeaux de telle sorte que, suivant l'expression d'un auteur contemporain, la ville entière était comme un temple magnifique, élevé à la gloire de Rosalie,
Pendant plusieurs jours, ce fut un mouvement universel dans la ville ; il semblait que personne n'eut plus de crainte du fléau, et les plus malades eux-mêmes étaient remplis d'un espoir qui ne fut pas trompé. Enfin, tous les préparatifs étant accomplis, on se disposa pour la cérémonie fixée au 5e jour des ides de Juin. Chaque soir on allumait des feux et des illuminations en l'honneur de la sainte, la veille du jour,un jeûne général fut décrété. Enfin arriva le jour choisi, et au son des cloches et des trompettes, et au bruit du canon, le défilé de la procession commença. On voyait d'abord une députation des quatre quartiers de la ville, ensuite marchaient tous les gentils-hommes divisé en quatre classes distinctes; puis venaient toutes les confréries au nombre de 93, portant les statues de leurs saints patrons; ensuite venait un chœur de jeunes filles au nombre de 200 chanteuses couronnées de fleurs, portant des palmes dans leur main et célébrant Rosalie qu'elles rappelaient non-seulement par leurs chants, mais par les traits qui brillaient en elles, de la jeunesse, de l'innocence et de la vertu; venaient ensuite les ordres religieux, et les Ecclésiastiques ; enfin l'on voyait une châsse magnifiquement composée de panneaux de cristal et d'argent, qui laissait voir les restes de Rosalie enveloppés de velours et de soie. La chasse reposait sur un brancard immense et il ne fallait pas moins de 32 jeunes gens pour la porter. Ceux-ci étaient de l'ordre des chevaliers. Ils étaient tout éclatants de riches habits et de pierreries. Un cortège de la noblesse suivait le corps, puis venait avec le clergé de la cathédrale le cardinal archevêque Doria, qui avait succédé aux fonctions du Vice Roi à la place du jeune prince de Savoie victime du fléau; autour de lui marchaient des sénateurs et des officiers du conseil Royal.
Il est impossible de dire quelle foule immense remplissait les rues, les portes, et les terrasses des maisons, tous éclataient en signe de joie et en larmes d'allégresse; lorsqu'on fut arrivé à la Cathédrale, la châsse fut placée dans la nef principale sur une estrade d'une hauteur immense; puis les chants et les prières retentirent avec les témoignages les plus vifs de la piété et de la confiance; ce qui peut donner une idée de toutes ces magnificences, c'est que les mieux informés estimaient que plus de 100,000 louis avait été dépensés par les particuliers ou le gouvernement dans cette fête (ce «qui équivaut à deux millions de piastres de la monnaie actuelle) Jusqu'à ce jour le fléau avait continué son cours, mais le lendemain, qui était le 28 de Juin on put remarquer une diminution sensible qui alla toujours en décroissant, et enfin au 15 Juillet la ville était complètement délivrée, ce dont on remercia le Seigneur dans les jours qui suivirent jusqu'au jour de l'anniversaire de la mort de Sainte Rosalie que l'on célébra avec une vive reconnaissance et qui tombait comme nous l'avons dit au 4e jour de Septembre. Depuis ce temps la peste éclata parfois à Palerme, mais on a toujours remarqué qu'elle cessait aussitôt, que l'on avait honoré les restes de Rosalie, par quelque démonstration solennelle.
14 Découverte de la Caverne de Quisquina
Le bruit s étant donc répandu dans toute la Sicile que l'on avait découvert les restes de Sainte Rosalie au mont Pellegrino, les citoyens, habitant dans le domaine de Quisquina eurent la pensée d'aller visiter la caverne, qui depuis longtemps était tombée dans l'oubli. On cite d'abord deux ouvriers nommés Tropiano et François Bonjiorno, qui commencèrent des recherches avec quelques gens du pays, au lieu indiqué par la tradition. Après avoir traversé avec la plus grande difficulté une forêt remplie de ronces et d'épines ils ne trouvèrent d'abord, au pied de la montagne que les ruines d'un petit sanctuaire, qui avait été élevé probablement en l'honneur de Sainte Rosalie, et enfin l'entrée d'une grotte. Nous allons donner le témoignage qu'ils ont rendu de leur tentatives devant les autorités du pays. Les témoins déclarèrent que depuis longtemps le souvenir était presque effacé dans le pays du véritable site de cette caverne dont l'entrée était complètement fermée par des éboulements considérables, on savait seulement qu'autrefois on avait coutume d'aller visiter cette retraite et qu'on y avait bâti une chapelle qui depuis longtemps était tombée en ruines. Après avoir déblayé l'entrée, ils avancèrent dans la grotte, et ils découvrirent avec des flambeaux, une croix gravée sur le rocher dont la surface était couverte de stalactites descendant du sommet de la caverne; ayant brisé cet obstacle ils découvrirent alors l'inscription gravée suivant la tradition, par Rosalie elle-même, les témoins ajoutent que le cristal qui la recouvrait, prouvait qu'elle devait être très-ancienne; ils remarquent de plus que plusieurs des mots étaient gravés, sur un pyrite si dur, que cela n'avait pu avoir lieu par aucune industrie humaine, ensuite ils rapportent la visite qui fut faite dans toute la caverne. Cette grotte est double, et il semble que la nature ait pris plaisir à la construire d'une façon merveilleuse. Après avoir fait quinze ou vingt pas dans la première, on trouve un creux qui forme une seconde caverne. L'entrée fait horreur à voir; la lumière n'y pénètre que par des fentes et par quelques crevasses, et l'on ne peut y pénétrer que par une étroite ouverture qui est en haut, et par laquelle on descend jusqu'au fond comme dans un puits. On y voit une longue pierre de la figure d'un lit un peu élevé de terre et en pente, en sorte que le haut est une espèce de chevet. Des bordures de roches excèdent dans les côtés de cette pierre, comme pour empêcher qu'on ne tombe de ce lit. Voilà quelle fut la demeure que Sainte Rosalie préféra au palais superbe des Rois de Sicile.
15 De la Dévotion envers Sainte Rosalie depuis la découverte de son corps
Nous pouvons reconnaître, que si la patronne de Palerme se plut à montrer sa tendresse et sa puissance envers ses dévots fidèles, ceux-ci aussi firent éclater de la manière la plus vive et la plus admirable, les témoignages de leur reconnaissance. Nous parlerons surtout de la chapelle qui à été élevée à la Cathédrale; du chemin qui a été construit dans la montagne pour l'utilité des pèlerins, et enfin du sanctuaire de la grotte de Rosalie. Quant à la Chapelle de la Cathédrale qui existe encore actuellement telle que le Cardinal Baronius a pu la voir, il en dit qu'il n'y a rien de comparable dans toute l'Italie. Les artistes Palermitains ont été de tout temps; célèbres pour l'exécution des mosaïques, ils ont conservé la science des anciens mosaïstes grecs avec un grand soin et ils se sont appliqués principalement aux mosaïques de marbre auxquelles ils ont donné un soin particulier qui mérite d'être admiré même, à côté des plus magnifiques ouvrages de ce genre, que l'on exécute actuellement aux ateliers du Vatican. Leur art s'applique surtout à la décoration monumentale des Eglises, et ils sont admirables pour l'élégance du dessin, l'éclat et l'harmonie des couleurs,enfin l'emploi des pierres précieuses. Or ils se sont surpassés à la chapelle de Sainte Rosalie ; on a dit qu'en raison des pierreries qui y sont enchâssées, elle n'aurait pas coûté d'avantage si elle avait été exécutée en argent massif, le prix en a été au moins de 16,500 écus d'or qui représente la valeur de plusieurs millions de la monnaie actuelle. Cette abondance de richesses est disposée avec un goût si merveilleux qu'elle ne parait pas excessive et on s'aperçoit que l'œuvre date des plus beaux temps de l'art en Italie. La chapelle est de plus ornée et entourée d'une grande quantité de lustres de cristal et d'argent d'un grand prix et enfin l'on voit dans une arcade au fond, une grille d'un riche travail derrière laquelle on peut admirer la chasse en argent de la Sainte. Elle se compose d'un soubassement eu forme d'autel tout incrusté de pierreries, au-dessus de l'autel plusieurs anges supportent un catafalque où l'on aperçoit à travers des ouvertures vitrées en cristal, le corps et les ossements de la Sainte; et enfin par dessus le Catafalque un piédestal supporté par de petits anges exécutés avec une merveilleuse délicatesse, nous fait apparaître une statue de Rosalie, en argent, qui est regardée comme un chef-d'œuvre. Il y a dans cette œuvre plus de 1800 livres pesant d'argent, ce qui équivaut à la somme de cent cinquante mille francs de la monnaie actuelle; mais le prix des pierreries qui s'y trouvent enchâssées est beaucoup plus considérable, ainsi que la valeur de la main d'œuvre.
Après qu'on a vénéré les restes de la Sainte, il convient qu'on aille visiter sa retraite au haut du mont Pellegrino; pour cela il faut sortir de la porte Macqueda au Nord et l'on trouve sur la droite le chemin qui a été pratiqué à travers des précipices inabordables. Cette montagne, qui a beaucoup de ressemblance avec Gilbraltar, est d'un si difficile accès que le chef des Carthaginois Amilcar Barca, père d'Annibal, s'y étant réfugié avec quelques troupes, put s'y défendre pendant trois ans contre les Romains. Le chemin est établi solidement en pierre de taille et consiste, en beaucoup d'endroits, en arcades au nombre de trente, qui comblent de profonds abîmes. Les dépenses en ont été considérables et l'on assure que do l'année 1675 à l'année 1720 on y a dépensé la somme de douze mille écus d'or. Le sentier est néanmoins très rapide, on l'appelle l'Echelle et on ne peut le monter qu'à pied ou à dos de mulet. Enfin après avoir atteint la hauteur de quinze cents pieds, on arrive à la grotte qui est précédée d'une Chapelle ornée d'une belle façade. A l'extrémité de la Chapelle on trouve l'entrée de la grotte ; cotte entrée est un couloir de dix pieds de longueur et si étroit qu'on ne peut le franchir, que très difficilement, en se glissant de côté. A l'extrémité on est dans la grotte qui a quatre vingts pieds de longueur, vingt cinq pieds de largeur et trente pieds de hauteur; à gauche on trouve un hémicycle où l'on pénètre par une petite ouverture. On pense que c'est là que Rosalie faisait sa méditation. Du même côté, à huit pieds du sol on voit une cavité d'une très petite étendue, c'est là que la sainte prenait son repos. A droite il y a dans le roc un bassin naturel, où viennent se réunir les eaux de la caverne, et l'on croit que c'est là que la Sainte soulageait sa soif En continuant à gauche, on trouve une sorte de berceau, où l'on a mis un autel. On croit que c'est là que Sainte Rosalie a rendu le dernier soupir, et c'est là qu'on a trouvée son corps à quelque profondeur dans le roc, on y a placé une statue qui représente la sainte en prière. C'est une des plus belles statues de l'Italie. La figure a une expression de noblesse, et de la piété la plus vive et la plus tendre. On ne peut se lasser d'admirer ce chef d'œuvre de délicatesse, et de sentiment. Elle est revêtue d'une robe d'or et de pierreries d'un travail remarquable. Enfin à l'extrémité se trouve un autel surmonté d'une statue de la sainte en pied. Ensuite on peut monter encore pendant dix minutes pour arriver au sommet de la montagne, où l'on trouve une autre statue de Rosalie, de là, la vue s'étend sur la Sicile jusqu'au mont Etna, qui est à 40 lieues de distance. Ce chemin est sans cesse parcouru par des pèlerins qui viennent de tous les pays. La sainte messe y est célébrée tous les jours et plusieurs fois dans l'année on y célèbre des solennités, où se rencontrent des assistances considérables. Enfin chaque année dans la ville on célèbre au mois de Juillet pendant une dizaine de jours de grandes fêtes, dont nous rendons compte plus loin.
16 De la dévotion envers Sainte Rosalie
Il nous reste à parler de l'extension de la dévotion à Sainte Rosalie dans le monde entier; sur les instances des Palermitains le souverain Pontife qui était Urbain VIIIe de la famille des Barberini, accorda la célébration de plusieurs fêtes en l'honneur de la sainte et fit mettre son nom au martyrologe romain. Il avait lu avec beaucoup d'intérêt le récit des prodiges accompli par la Sainte depuis l'invention de son corps et avait une vive confiance en elle; ayant reçu une relique de la Sainte, il la portait toujours sur lui, c'est à cette occasion qu'il écrivit ces paroles au clergé de Palerme: « Nous avons reçu par vous des joyaux du Paradis, que noua préférons à l'or et aux pierres les plus précieuses, ce sont des reliques de Sainte Rosalie choisies au trésor céleste de l'Eglise de Palerme. Aussitôt le cœur de notre charité pontificale s'est exalté sous la rosée de cette consolation sainte. Nous prions donc en retour, cette Vierge qui règne avec le Tout-puissant d'intercéder en votre faveur, afin que celle qui a repoussée de son sol natal le fléau de la peste comme on le croit justement, repousse aussi par la puissance de ses mérites le fléau des maux qui affligent en ce moment l'Italie. Et vous qui nous avez adressé un présent si agréable aux Anges et si salutaire au monde, nous vous ouvrons les bras de notre bienveillance paternelle ». Dans les années suivantes la gloire de Rosalie se répandit par toute la terre par les prodiges les plus merveilleux, et les plus sûrement constatés. Plusieurs villes affligées par des contagions ou des tremblements de terre ayant eu recours à elle, furent délivrés presque instantanément de leurs maux. On cite à cette époque des miracles opérés en son nom. dans un grand nombre de villes de la Sicile et de l'Italie. Vers le même temps la reine de France, Anne D'Autriche, qui témoignait la plus vive piété pour les saints, fit tous ses efforts pour introduire cette dévotion en France. Elle obtint une relique principale de la Sainte et la conserva précieusement dans sa chapelle, et à son exemple, les Pères Jésuites vers 1630, ayant obtenu des Jésuites de Palerme une relique de la Sainte, la déposèrent dans un riche reliquaire de l'Eglise de leur Collège principal à Paris, l'Eglise Saint Louis, de la rue St. Antoine.
La dévotion se répandit ensuite en France, et plusieurs villes proclamèrent être redevables de la délivrance de la peste, à cette grande Sainte. On cite surtout les villes de Béziers, de Thiers et de Moulins, où de grandes fêtes furent instituées, et qui furent célébrées chaque année avec une grande pompe, jusqu'aux jours de la révolution. Nous pourrions encore citer d'autres pays, mais nous croyons qu'il est intéressant de remarquer comme cette dévotion se répandit jusqu'aux extrémités de la terre, dans les Indes et dans les différentes contrées de l'Amérique. On cite surtout le Brésil, le Pérou, le Mexique, les Antilles et enfin la Californie. Au Brésil une congrégation de jeunes filles fut mise sous son nom au XVIIIe siècle, des jeunes filles vivant dans le monde s'engagèrent à porter en son honneur, l'habit erémitique. Au Pérou sa vie fut traduite en espagnol et répandue, son nom, était très souvent donné aux enfants, enfin l'on honorait d'une grande dévotion une relique qui avait été obtenue, et qui a été placée dans l'une des Eglises de la capitale, la ville de Lima. A la Havane cette dévotion était en grand honneur; et en Californie il existe une ville, sur les bords du Colorado, qui a reçu le nom de Sainte Rosalie en 1701.
17 Fêtes en l'honneur de Sainte Rosalie
Nous allons parler maintenant des fêtes qui sont célébrées chaque année à Palerme en l'honneur de la Sainte et qui durent prés de quinze jours. On se prépare pendant un mois à décorer la ville pour cette solennité où figurent du reste différents objets de prix, qui sont conservés pendant l'année avec soin, entre autres un char gigantesque de quatre vingts pieds de hauteur sculpté et doré avec la plus grande magnificence. Nous pensons qu'on pourra se rendre compte de la beauté de ces fêtes en lisant le récit suivant. Ce récit a été donné dans le dernier siècle par le voyageur Anglais Brydone; mais il rend encore très-fidèlement les incidents de cette fête,qui sont scrupuleusement conservés chaque année. Pendant un mois à l'avance, la ville est occupée des préparatifs de la fête; on commence par orner les deux grandes rues qui se coupent à angle droit, au centre de la ville; au devant des maisons, on élève des portiques et des pyramides en si grande quantité, qu'on en compte au moins deux mille, formant deux lignes parallèles d'un bout de chaque rue à l'autre et ayant chacune près de deux milles de longueur. Ces décorations, en toiles peintes, de couleurs scintillantes, de ce beau style sicilien qui se ressent de l'Orient, sont recouvertes de lampions et de verres de couleur. Les quatre portes de la ville correspondant à chacune de ces rues, sont décorées de la môme manière. La grande place qui précède la ville sur le port, et qui est vaste, est aussi couverte d'arcs et de pyramides; mais en outre, il y a des parterres de fleurs figurées en verres de couleur, et des ouvrages de bois décorés, imitant avec verres de couleur et globes de feu, différents arbres comme des palmiers, des orangers, des citronniers, avec un art merveilleux qu'on ne trouve qu'en Sicile. Au milieu de ce parterre, il y a une grande estrade pour le feu d'artifice; il y en a une seconde pour un autre feu d'artifice en face au bout de la ville près de la Cathédrale. Enfin on prépare sur le port le char de Sainte Rosalie. C'est une immense construction établie sur une base de soixante pieds de longueur et de trente pieds de largeur. Le char a quatre vingt pieds de hauteur avec la statue colossale d'argent qui la couronne et qui repose sur une coupole étincelante supportée par des colonnes dont le piédestal est à cinquante pieds du sol sur une estrade entourée de galeries et se reliant à la base par d'immenses degrés. Les maisons sont décorés sur tout le parcours avec la plus grande richesse, les citoyens tiennent à honneur d'exposer ce qu'ils ont de plus riche dans leurs maisons, on draperies, tentures, vases précieux et candélabres qui sont ornées de bougies avec un art remarquable. Malgré toutes ces magnificences on peut dire que c'est à la Cathédrale que se déploie le plus grand luxe. Les murs sont revêtus ainsi que les galeries, les tours et les toits, de glaces encadrées d'ornements d'or et d'argent et d'une quantité innombrable de feuillages et de fleurs disposés avec la plus grande délicatesse. Tout l'extérieur est garni de cordons de bougies et de lampes de différentes couleurs qui sont alternées, avec un art merveilleux. L'intérieur est encore plus riche, les autels, les chapelles, les colonnes sont ornés de lames d'or et d'argent, de manière à donner à chaque partie plus de relief, et à prêter à l'ensemble une grandeur plus imposante. Les glaces de la voûte la font paraître d'une hauteur incalculable, et les glaces des parois augmentent indéfiniment les dimensions de la longueur et de la largeur de l'édifice. Des voûtes descendent 1500 lustres, où l'on compte 20,000 bougies, et lorsque tout est allumé l'édifice paraît répété des milliers de fois avec un éclat, où il semble qu'on ne voit qu'or, argent et pierreries.
Enfin
le 12 Juillet vers 4 heures du soir, la fête est ouverte au son des
cloches et au bruit du canon. Les vaisseaux de la rade qui sont
pavoises et couverts de lampions répondent aux salves de
l'artillerie, puis le char se met en marche. Sur les étages du char
des musiciens en grand nombre, et des quantités d'enfants couronnés
de fleurs sont assis; il est précédé par des cavaliers, des
trompettes et des tambours. Il dépasse de beaucoup les plus hautes
maisons dont les fenêtres et les terrasses regorgent de spectateurs.
Autour du char trainé par cinquante mules, il y a des cortèges de
jeunes gens et de jeunes filles, qui jouent du triangle, du tambour
de basque et qui dansent, comme le Saint Roi David devant l'arche en
faisant mille évolutions autour du char. En avant du char l'on voit
les saints Patrons des différentes confréries portés sur des
estrades, environnés de bannières, accompagnes de jeunes gens et de
chœurs de chant. Le cortège s'arrête tous les cent pas et alors
l'orchestre joue un morceau de musique, accompagné de chants en
l'honneur de la Sainte. C'est en ce moment surtout que les fidèles
accourent des rues transversales et descendent des maisons pour venir
vénérer sa chasse, faisant toucher des croix, des chapelets et
autres objets de piété. On doit dire qu'il n'y a rien de plus
frappant que l'empressement et les témoignages de piété de cette
population si vive et si impressionnable. C'est ce qui touche le plus
les étrangers: une foule sans cesse renouvelée se précipite vers
le char, les fidèles s'agenouillent avec ferveur et font retentir
l'air d'acclamations et de louanges. Enfin on arrive à la cathédrale
et on en voit la décoration qui dépasse toute l'idée qu'on peut
s'en faire. Ces ornements de lames d'or et d'argent festonnés de
fleurs, illuminés par tant de feux, reflétés de tous côtés par
les glaces, sont d'un éclat prodigieux et donnent à l'édifice un
aspect diaphane, il semble qu'on soit en un palais de fériés. Après
les prières et les bénédictions, la ville s'embrase de lumière,
les grandes rues sont tout en feu, les vaisseaux illuminés et
pavoises font mille circuits dans la rade, en faisant retentir leurs
canons et leurs pièces d'artifice. Ces fêtes durent plusieurs jours
et chaque soir on voit quelque chose de nouveau; au 1e et 3e jour,
les feux d'artifice sont tirés simultanément aux deux extrémités
de la ville; et au dernier jour, quand la procession est terminée et
que toute les illuminations sont en feu, le Vice-Roi qui a suivi le
char avec toute sa cour monte sur un vaisseau, qui, suivi de toutes
les embarcations illuminées, fait le tour de la rade, au bruit du
canon et des instruments de musique.
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