Spiritualité Chrétienne

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Saint Philippe Benizi

Saint Philippe Benizi

Propagateur de l'Ordre des Servites de Marie

1233-1285

Fête le 23 août


Saint, Philippe Benizi était florentin, fils d'un noble bourgeois de cette ville, nommé Jacques Benizi, et d'une femme fort pieuse, appelée Albande. Il n'avait encore qu'un an lorsque quelques-uns des religieux Servites étant venus quêter dans Florence, il s'écria avec d'autres enfants du même âge: « Ce sont là les serviteurs de la Vierge ». Ce qui fut cause que sa mère leur fit libéralement l'aumône. La bonne éducation, qu'il reçut de ses parents le conserva dans l'innocence, dans la chasteté et dans la piété proportionnées à son âge. Il fit ses humanités dans son pays. Ensuite il vint à Paris, où il étudia la médecine, et de là il s'en alla continuer la même étude dans l'université de Padoue, qui l'honora du bonnet de docteur. Etant retourné chez lui, comme il était à la messe dans la chapelle des Servites, auprès de Florence, le jeudi dans l'octave de Pâques, il fut ravi en extase, et le ciel lui fit connaître qu'il devait entrer dans la Congrégation des Servites. Il obéit, mais il ne dit rien de ses études, ne voulant pas être du choeur, mais seulement frère laïque, pour se conserver plus constamment dans l'humilité et la simplicité religieuses. Après sa réception, on l'envoya à la maison du Mont-Senario ou Asenai, à trois ou quatre lieues de Florence, où les sept premiers Servites, tous riches marchands de cette ville, avaient commencé leur institut en l'honneur de la sainte Vierge. Il s'y appliqua, selon son état, aux offices extérieurs et au travail manuel, et il s'en acquitta toujours avec une diligence et une exactitude admirables mais il ne laissait pas de trouver du temps pour méditer les mystères de notre foi, surtout la passion de Notre-Seigneur et les douleurs de sa sainte Mère sur le Calvaire.


Pour cela, il se retirait dans une caverne auprès de l'église, où le feu de l'amour divin l'emportait quelquefois tellement hors de lui-même, qu'il oubliait entièrement non corps. D'autres fois il se châtiait avec une sévérité impitoyable, et versait des torrents de larmes pour expier les offenses qu'il croyait avoir commises dans sa jeunesse et dans sa vie séculière. Cela fut si agréable à Dieu, qu'il fit sourdre en sa faveur, au milieu de sa caverne, une fontaine qui jette encore à présent des eaux en abondance, et qu'on appelle la Fontaine de saint Philippe. Deux religieux de Saint-Dominique, voyageant un jour avec lui, reconnurent les grands talents, la sagesse et la science qu'il tenait cachées sous son humble condition de frère laïque. Ils eurent de la peine de voir une lumière si éclatante ensevelie dans les ténèbres et trahirent son humilité en avertissant ses supérieurs on l'obligea de recevoir le sacerdoce. Lorsqu'il dit sa première messe, on entendit, à l'élévation de l'hostie, des voix célestes qui chantaient alternativement: « Sanctus, sanctus, sanctus »; ce qui lui ôta les doutes qu'il avait touchant sa vocation au sacerdoce. Il passa ensuite par tous les degrés de son Ordre car il fut définiteur, puis assistant général, et enfin ses grands mérites le firent élire et confirmer général. Il résista beaucoup à cette dernière élection, s'estimant incapable de la conduite de ses frères; mais il eut ordre du ciel d'y déférer, parce qu'elle venait du Saint-Esprit, et que Dieu se voulait servir de lui en cet office pour de grandes choses. Il rencontra un jour un lépreux qui lui demanda l'aumône. Il n'avait alors ni or ni argent; mais, sa charité le pressant de secourir Jésus-Christ. dans son membre, il se tira à l'écart, et, s'étant dépouillé de sa tunique de dessous, il la lui donna. Le lépreux, qui était presque nu, s'en revêtit, et à l'heure même il fut guéri de sa lèpre, recevant ainsi une double grâce par une seule aumône.



Sa modestie parut avec éclat lorsque, après la mort de Clément IV, les cardinaux, assemblés à Viterbe, jetèrent les yeux sur lui pour l'élever sur le siège de saint Pierre. Il fut si épouvanté de ce projet, qu'il s'enfuit secrètement sur les montagnes de Sienne, avec un ou deux de ses religieux seulement, et s'y tint caché dans les trous de la terre jusqu'à ce que le conclave eût donné un autre pasteur à l'Eglise. Philippe, durant tout le temps de cette solitude, s'occupa continuellement à la prière et aux larmes. Le jeûne était sa nourriture les veilles son soulagement et son repos l'entretien avec Dieu, sa récréation et son divertissement. Il ne mangeait point de paie mais seulement des herbes sauvages et insipides. Il ne buvait que de l'eau, et, comme elle lui manqua au milieu des sables et des rochers, il frappa trois fois la pierre de son bâton, et il en sortit aussitôt en telle abondance, qu'elles firent comme une mare qui a été appelée les Bains dé saint Philippe. Quelques auteurs, néanmoins, disent que ces eaux y étaient déjà, et qu'il leur donna seulement une vertu médicinale par sa bénédiction. Elles sont sur la montagne appelée Montaniata. Dieu lui fit connaître en ce lieu qu'il devait porter son nom et la dévotion envers la sainte Vierge, dans les autres provinces et dans les royaumes étrangers. C'est pourquoi, ayant fait assembler un chapitre général, il y établit un vicaire en sa place pour l'Italie, et partit avec deux compagnons pour aller publier de tous côtés les grandeurs et les mérites de cette glorieuse Reine des anges. Il vint premièrement en France, où il prêcha à Avignon, à Toulouse et à Paris avec un grand succès. De là, il passa aux Pays-Bas, au duché de Saxe en Allemagne. Il établit en beaucoup d'endroits des maisons de son Ordre.


II employa deux ans à cette mission en revenant en Italie, il traversa des forêts et des déserts, où les vivres lui manquèrent. Ses compagnons ne pouvant plus se soutenir, il implora le secours de la sainte Vierge, et, à l'heure même, il vit devant lui du pain et de l'eau, qui servirent à apaiser leur faim et à renouveler leurs forces. A son retour, il fit encore de nouveaux efforts dans son Chapitre général de Borgo, pour être soulagé du poids insurmontable de son office; mais, bien loin de l'écouter, on l'y confirma pour le reste de sa vie c'est ce qui l'obligea de se trouver au second concile général de Lyon, que le pape Grégoire X assembla en 1274, pour la réunion des Grecs et le recouvrement de la Terre Sainte. Il pria le concile d'approuver et de confirmer son Ordre, ce qui lui fut accordé très-volontiers, l'assemblée ne pouvant douter de l'utilité d'une Compagnie qui avait un chef d'un si grand mérite. C'est pour cette raison que le martyrologe romain l'appelait Instituteur ou Fondateur de cet Ordre, quoiqu'en effet il n'y soit entré que quinze ans après son établissement, et qu'il n'en ait été que le cinquième général; mais aujourd'hui il ne lui donne plus que le nom de Propagateur. Outre les grâces que nous avons déjà remarquées en lui, il avait un talent particulier pour réconcilier les ennemis, pour apaiser les rébellions et pour procurer la paix aux villes et aux provinces qui étaient dans le trouble. A Pistoie, il accommoda les cruelles dissensions des Guelfes et des Gibelins, qui étaient acharnés les uns contre les autres. Il en fit de même à Florence, dans la compagnie du cardinal Ursin, légat du Saint-Siège. Il alla aussi à Forli, pour faire rentrer les habitants dans l'obéissance du pape Martin II, contre lequel ils s'étaient révoltés mais s'il n'eut pas la consolation de les convertir, il eut au moins la joie et le bonheur de souffrir une ignominie pour la cause du vicaire de Jésus-Christ car ces pervers, ne pouvant souffrir la véhémence de ses prédications pleines de feu, se jettent sur lui, le dépouillent honteusement et le fouettent par les carrefours de la ville après quoi, ils le chassent de l'enceinte de leurs murs, pour ne plus entendre la juste réprimande de leurs crimes. Sa patience, néanmoins, ne fut pas stérile, car elle convertit un de ceux qui l'avaient frappé, lequel, touché de repentir, voulut faire pénitence de son sacrilège dans son Ordre, et y vécut depuis dans une très grande sainteté.


Enfin Philippe, prévoyant que la fin de sa vie était proche, assembla pour la dernière fois son chapitre général à Florence là, ayant déclaré à ses religieux que le temps de son départ viendrait bientôt, il les exhorta à l'union entre eux et à l'observance constante et inviolable de la discipline régulière. Ses propres larmes et les gémissements de ses enfants l'empéchèrent de prononcer son discours. Il le finit donc en disant: « Aimez, aimez, aimez ». Ensuite, il alla à Sienne, et de là à Pérouse, pour baiser les pieds du pape Honorius IV et lui demander sa bénédiction; il en obtint de beaux privilèges pour son Ordre. Au sortir de Pérouse, il prit le chemin de Todi, dans la Marche d'Ancône. Les habitants de cette ville, qui connaissaient son mérite, sortirent en foule au-devant de lui, avec des branches d'olivier pour le recevoir. Mais l'humble serviteur de Marie à qui les honneurs et les louanges étaient insupportables, se détourna adroitement de l'avenue pour éviter cette ovation. Dans le détour qu'il prit, il rencontra deux femmes de mauvaise vie, qui se moquèrent de lui et lui dirent des injures. Il les reprit doucement de leur impudence, et, après les avoir confondues, il leur offrit de l'argent, à condition qu'elles se contiendraient trois jours sans retomber dans leur péché; elles s'y engagèrent par serment, et elles s'en acquittèrent avec tant de fruit, qu'elles renoncèrent pour toujours à leur infâme commerce, et entrèrent parmi les filles pénitentes, où elles vécurent avec beaucoup d'édification et de sainteté. Lorsqu'il entra dans l'église de son Ordre, il se prosterna devant l'autel de la sainte Vierge, et prononça ces paroles du Roi-Prophète: « C'est ici mon repos pour tous les siècles ». Et, sans vouloir prendre aucun repos, il passa toute la nuit en oraison et en pénitence. Le lendemain, il monta en chair dès le matin, et fit un sermon admirable sur la gloire des Saints, dont son auditoire fut tout transporté.


La fête de l'Assomption de Notre-Dame approchant, il fut saisi de la fièvre, qu'il regarda comme l'heureux instrument qui détacherait son âme des liens qui la tenaient attachée à son corps. Pour se disposer à la mort, il fit une prière très-dévote, en forme de paraphrase sur le psaume Miserere, s'appliquant toutes les paroles de ce psaume comme à un très grand pécheur. Ensuite, il se confessa très dévotement et passa le reste de l'octave dans des sentiments de componction et de pénitence. Sur la fin, il se fit apporter le Viatique, qu'il reçut avec de grands transports d'amour, disant a Jésus-Christ: « C'est vous, mon Seigneur, en qui j'ai cru, c'est vous que j'ai prêché, que j'ai cherché et que j'ai aimé ». Disant les Litanies, il tomba en défaillance à ces paroles: « Peccatores, te rogamus, audi nos », et on le crut mort pendant trois heures. Mais, étant revenu à lui, il dit à ses religieux: « Je viens de soutenir, mes Frères, un grand combat; car le démon, plein de rage et de malice, me représentant tout les péchés de ma vie, et soutenant que je devais pour cela être condamné aux enfers, s'est efforcé de me faire tomber dans le désespoir; mais Jésus-Christ, mon Sauveur, et Marie, sa très-sainte Mère, ont repoussé les flèches de ce cruel et pernicieux ennemi, et m'ont tellement favorisé par leur bonté, qu'après l'avoir chassé de ma présence, ils m'ont fait voir le royaume éternel qui m'est préparé. Prenez donc garde, mes Frères, de vous laisser tromper par cet imposteur, qui ne fait autre chose que travailler à la perte des hommes, et servez-vous des armes que Notre-Seigneur vous met entre les mains, qui sont l'abstinence, l'humilité, la patience, et surtout la charité, qui est la reine des vertus ». Il finit ce discours en demandant son livre; on ne savait quel livre il voulait mais ce livre était son Crucifix, qu'il avait étudié toute sa vie, et dans les embrassements duquel il voulut mourir. Il le baisa plusieurs fois, et raconta à ses enfants les biens inestimables qu'il avait reçus par son moyen. Il récita après cela le cantique Benedictus et le psaume In te, Domine, speravi; à ces paroles: In manus tua Domine, etc., il rendit effectivement son esprit entre les mains de son souverain Seigneur. A sa mort, on entendit dans les airs ces paroles: « Courage, bon et fidèle serviteur parce que tu as bien conduit la famille de la Vierge, dont on t'avait donné la conduite, entre dans la joie de ton Seigneur ». Ce précieux moment arriva l'an 1285, le 22 août, qui est celui de l'Octave de Notre-Dame, bien que sa mémoire ne se fasse qu'au 23.


Le lieu où il mourut fut aussitôt rempli d'une odeur très agréable qui sortait surnaturellement de son corps, et son visage envoya des rayons qui éclairèrent toute la chambre pendant la nuit. Ses religieux furent saisis d'une joie extraordinaire qui apaisa toute leur tristesse. On ne put l'enterrer durant trois jours, à cause de la foule de monde qui accourait pour le voir et des miracles qui se faisaient par l'attouchement de ses membres. Deux morts ressuscitèrent, dont l'un était un enfant qu'un loup avait étranglé. Une femme, percluse de ses bras et de ses jambes, fut guérie, et un aveugle recouvra la vue. Une autre femme, se moquant de ces merveilles, perdit soudain la parole, et elle ne la put recouvrer que par les mérites de celui qu'elle avait méprisé. Ses habits, que l'on conserva fort honorablement à Todi, servirent aussi depuis à la guérison d'un grand nombre de malades. Son cilice, que l'on garde à Florence, dans la maison de l'Annonciade, a surtout une vertu particulière pour éteindre les incendies. Il s'est fait, en 1317, une translation de ses reliques, où ses premiers miracles ont été renouvelés. En 1516, le pape Léon X permit aux religieux Servites de célébrer sa fête ce que le pape Paul V étendit à toutes les églises de Florence, en 1615. Enfin, le pape Clément X l'a solennellement canonisé en 1671 mais la bulle de sa canonisation n'a été publiée qu'en 1724, par Benoît XIII. On peint parfois saint Philippe Béniti avec trois couronnes que deux anges soutiennent au-dessus de sa tête. Il est aussi représenté frappant la terre de son bâton et en faisant sortir une source.

 

Texte extrait des Petits Bollandistes volume X




23/08/2010
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