Saint Moïse le Hongrois
Saint Moïse le Hongrois
+ en 1043
Fêté le 26 juillet
De ce Moïse le Hongrois, nous savons qu'il fut aimé par saint Boris. Hongrois de naissance, frère de ce Grégoire, à qui saint Boris donna la chaîne en or et avec qui saint Boris fut tué près du fleuve d'Alta, lorsqu'on lui coupa la tête à cause de la chaîne. Ce Moïse seul, se sauva de devant la mort cruelle et se rendit chez Predslave, la soeur du prince Jaroslav. Et il resta à Kiev près d'elle. En ces jours, on ne pouvait aller nulle part ail-leurs. Il resta ainsi en prière avec Dieu, jusqu'à ce que le pieux prince Jaroslav remportât la victoire, guidé par son amour fraternel et chaleureux, contre Sviatopolk, le sans-Dieu, orgueilleux et maudit. Sviatopolk s'enfuit en Pologne, revint avec Boleslav, chassa Jaroslav et régna lui-même à Kiev. Boleslav revint alors en Pologne, en emmenant les deux soeurs de Jaroslav et ses boyards captifs. Avec eux fut aussi emmené ce bienheureux Moïse, lié avec de lourds fers aux mains et aux pieds, et gardé sévèrement, car il était fort en son corps et beau de visage.
Mais il fut vu par une dame de noblesse, belle et jeune, et dotée d'une grande richesse et d'une grande beauté de son apparence, et s'enflamma de concupiscence envers ce vénérable. Et ainsi elle commença de le tenter, pour le séduire par des paroles flatteuses, lui disant: "Homme, pourquoi supportes-tu de telles peines, alors que tu as l'intelligence pour te délivrer de ces entraves et de ces souffrances?". Mais Moïse lui disait: "Dieu l'a voulu ainsi". Alors la femme lui disait: "Si tu fais ce que je veux, alors je te libère et t'élève en toute la Pologne." Le vénérable comprit son désir mauvais et lui dit: "Quel homme est jamais devenu meilleur en prenant femme ? Le prophète Adam fut chassé du paradis, après s'être soumis à la femme. Samson dépassait tous par sa force et vainquit tous les guerriers. Finalement, il fut livré par une femme aux étrangers. Et Salomon, qui atteignit la profondeur de la sagesse, commençait à vénérer les idoles, après avoir prêté l'oreille à une femme. Hérode remporta beaucoup de victoires. Ensuite, il laissa décapiter Jean le Baptiste, quand il se soumit entièrement à une femme." Mais elle disait: "Je te rachèterai et te ferai grand et maître de ma maison. C'est toi qui seras mon mari. Toi seul feras mes volontés, satisferas les passions de mon coeur, et m'accorderas de jouir de ta beauté. Car je suis éprise de toi. Je ne peux supporter de voir ta beauté se perdre ainsi sans raison. Que cesse le feu de mon coeur qui me dévore ! Que soient consolées mes pensées et que je trouve consolation dans ma souffrance ! Alors tu jouiras de ma bonté et tu seras le maître de toute ma possession, l'héritier de ma puissance et le premier de mes boyards !" Mais le bienheureux Moïse lui disait: "Sache que je ne satisfais pas tes désirs. Je ne veux ni ta puissance, ni ta richesse. Car mieux que tout cela est la pureté du coeur et mieux encore l'intégrité du corps. Loin de moi d'avoir supporté inutilement la peine de cinq ans où le Seigneur m'a permis de porter ces chaînes. Je porte de telles souffrances innocemment, et j'espère pour cela, être libéré des supplices éternels." Alors la femme fut conseillée autrement par le diable et se disait, en voyant lui échapper une telle beauté: si je le rachète, il se soumettra contre sa volonté. Et elle rencontra celui qui le tenait captif, afin qu'il lui cédât Moïse et en prît ce qu'il désirerait. Et lui, profitant de l'occasion, prît environ mille Grives et lui concéda Moïse. Et ainsi, Moïse fut impudemment poussé vers des actes indignes. Elle gagna de la force sur lui et lui commanda de rester près d'elle. Elle le libéra de ses chaînes, le fit habiller en des vêtements précieux, lui fit servir de la nourriture délicieuse et tenta de le forcer à l'amour et à la concupiscence.
Mais le vénérable s'adonna davantage à la prière et au jeûne, quand il voyait la furie de la femme; car il préférait plutôt prendre du pain sec et de l'eau à cause de Dieu, que de prendre des mets délicieux et du vin en forniquant. Et il jetait, tel Joseph, non seulement sa chemise, mais tous ses vêtements. Ainsi, il échappa au péché et méprisa la vie de ce monde, pendant qu'elle voulait le laisser mourir de faim. Mais Dieu n'abandonne pas son serviteur qui espère en Lui. Il fléchit le coeur d'un esclave de cette femme, afin qu'il donnât à manger secrètement à Moïse.
Mais les autres tâchaient de le convaincre et disaient: "Frère Moïse, qu'est-ce qui t'empêche de te marier ? Tu es encore jeune, et elle est veuve, elle n'a vécu qu'une année avec son mari. Et elle est plus belle que toutes les autres femmes. Elle possède des richesses inestimables et une grande puissance en Pologne. Si elle avait désiré un prince, il ne l'aurait pas méprisée. Tu es un prisonnier, et tu ne désires pas être libéré ! Et si tu dis ne pas vouloir transgresser les commandements du Christ, ne dit-il pas, le Christ, dans l'Évangile: 'Alors l'homme quittera père et mère et s'attachera à sa femme, et les deux ne seront qu'une seule chair' ? L'apôtre dit: 'Mieux vaut se marier que de brûler', et il conseille aux veufs de se remarier. Pourquoi te soumets-tu à des tortures mauvaises et amères, et pourquoi souffres-tu, alors que tu n'as pas prononcé de voeux monastiques, et que tu es donc libre ? Si tu meurs dans la détresse, quelle louange récolteras-tu ? Qui, parmi les justes, jusqu'à présent, a méprisé les femmes ? Abraham, Isaac et Jacob furent-ils des moines ? Joseph remporta une petite victoire, mais par une autre femme il fut vaincu. Tu seras aussi vaincu par une femme, si tu te sépares de la vie. Qui ne se moquera pas alors de ta folie ? Soumets-toi à cette femme et ainsi tu seras libre et maître sur tous."
Mais lui leur répondait: "O mes frères et bons amis, bien vous me conseillez ! Je vois que vos paroles ne valent pas mieux que le chuchotement du serpent à Eve au paradis. Vous me poussez à me soumettre à cette femme. Mais je ne suivrai pas votre conseil. Si je dois mourir dans ces chaînes et dans cette souffrance amère, j'espère trouver grâce devant le Seigneur. Quand bien même tous les justes se mariaient et furent sauvés, moi, pécheur, je ne peux me sauver par le mariage. Si Joseph avait écouté la femme de Potiphar, il n'aurait pas régné par la suite. Dieu voyait sa souffrance et lui donna le pouvoir. C'est pourquoi nous le louons toujours chaste, malgré le fait qu'il a eu des enfants. Moi je ne veux pas régner en Egypte, ni avoir le pouvoir, ni devenir grand en Pologne et honoré en Russie; car c'est pour le royaume des cieux que je supporte tout cela. Et si j'échappe vivant de la main de cette femme, je me ferai moine. Car comme dit le Christ dans l'Évangile: 'Celui qui quitte son père et sa mère et femme et enfants et maison sera mon disciple.' Ainsi dois-je plutôt obéir au Christ qu'à vous. L'apôtre dit: 'Qui se marie se soucie de la manière de plaire à sa femme; qui est libre se soucie de la manière de plaire au Seigneur.' Je vous questionne: qui dois-je servir ? Christ ou une femme ? Les serviteurs obéissent à leurs maîtres, dans le bien et non dans le mal. Saisissez-vous a-lors, vous qui avez pouvoir sur moi, que la beauté de cette femme ne saurait me séduire et me séparer de l'amour pour le Christ ?"
Quand la femme apprit cela, elle conçut une pensée rusée dans son coeur. Elle le fit monter sur un cheval et, accompagné de beaucoup de serviteurs, le fit conduire à travers les châteaux et les villages - ce qui lui appartenait - et lui dit: "Tout cela t'appartient. Tu peux en disposer comme tu veux". Et aux gens, elle disait: "Voilà votre maître et mon mari. Que tous s'inclinent devant lui, lors de leur passage." Car elle avait beaucoup de serviteurs et d'esclaves. Mais le bienheureux se riait de la folie de la femme et lui dit: "Tu te donnes de la peine inutilement. Tu ne peux me séduire par les choses périssables de ce monde, ni me ravir ma richesse spirituelle. Comprends cela et ne te fatigue pas pour rien !" Mais la femme lui dit: "Ne sais-tu pas que tu m'appartiens ? Qui peut te délivrer de mes mains ? Je ne te libérerai pas vivant, mais je t'abandonnerai, après de multiples tortures, à la mort." Mais il lui répondit sans crainte: "Je n'ai pas peur de ce que tu me dis. Celui qui m'a livré à toi portera le plus grand cri-me. Mais moi, je me ferai, plaise à Dieu, dès maintenant moine."
En ce temps arriva de la Sainte Montagne un moine qui le revêtit de l'habit monastique, l'instruisit bien sur la pureté, et lui recommanda de ne pas céder à l'ennemi et de se libérer de cette femme vicieuse. Après avoir dit tout cela, il le quitta, et après recherches, on ne le retrouva plus. Alors la femme désespérant de la réalisation de son but fit battre durement Moïse. Elle le fit étendre et bâtonner, au point que la terre était humectée de son sang. En le bâtonnant, on lui disait: "Obéis à ta maîtresse et accomplis ses volontés. Si tu ne veux pas obéir, alors nous mettrons ton corps en pièces. Ne pense pas que tu puisses échapper à ces tortures. Tu quitteras ton âme amèrement, après beaucoup de souffrances. Aie pitié de toi-même. Dépose ces vêtements usés et revêts-toi d'habits précieux. Libère-toi de ces peines qui t'attendent, avant que nous ayons touché ton corps." Mais Moïse leur répondit: "Frères, faites sans hésitation ce qui vous est commandé. Je ne pourrai jamais renoncer à la vie monastique ni à l'amour du Christ. Aucun supplice, ni feu, ni glaive, ni coups ne peuvent me séparer de Dieu et de la vie angélique de moine. Cette femme impudique, dont l'esprit est obscur-ci montre son impudeur, non seulement en ne craignant pas Dieu, mais aussi en bafouant la pudeur humaine, car elle veut me forcer à commettre l'impureté et la fornication sans aucune honte. Je ne me soumets pas à elle, ni n'accomplis la volonté de cette misérable".
Mais la femme, qui en conçut beaucoup de chagrin, envoya ce message au prince Boleslav, pour venger sa honte: "Tu sais toi-même que mon mari succomba dans une de tes campagnes. Et tu m'as permis de prendre pour mari celui que je désire. Je me suis éprise d'un bel adolescent parmi tes prisonniers. Je l'ai racheté et l'ai pris dans ma maison, après avoir payé pour lui beaucoup d'or. Tout ce qui se trouve dans ma maison, de l'or,de l'argent, et tout mon pouvoir, je les lui ai donnés. Mais lui, il n'en fait aucun cas. Je l'ai fait torturer par la faim et par des coups maintes fois; Mais tout cela ne l'a pas influencé. Pendant cinq ans, il fut lié par celui qui le tenait en prison et à qui je l'ai racheté. La sixième année, il est resté avec moi, et je l'ai laissé beaucoup torturer à cause de sa désobéissance. Lui-même en était la cause du fait de son obstination. Maintenant un moine lui a donné l'habit. Mais moi, je ferai avec lui ce que tu commanderas."
Boleslav commanda à la femme de venir ensemble avec Moïse. La femme se rendit donc chez Boleslav avec Moïse. Boleslav vit le vénérable et essaya de le convaincre d'épouser la femme. Comme il n'y réussit pas, il lui dit alors: "Qui est aussi insensé que toi, qui laisses échapper tant de biens et d'honneurs, et t'exposes à des supplices si cruels ? Sache maintenant que ta vie ou ta mort dépendent de toi: ou tu fais la volonté de ta maîtresse et tu reçois d'elle honneur et grande puissance, ou tu restes désobéissant et tu seras reçu par la mort au bout de beaucoup de tourments !" Et il dit à la femme: "Ne libère aucun de tes esclaves que tu as acquis et avec celui-ci fais ce que tu veux comme une maîtresse avec son esclave, afin que les autres non plus n'osent désobéir à leurs maîtres." Et Moïse répondit: "Que dit le Seigneur ?: 'Que sert à l'homme de gagner le monde entier, s'il perd son âme ?' Ou: 'Que peut donner l'homme pour racheter son âme ?' La gloire et l'honneur que tu me promets, tu les perdras bientôt toi-même, et la tombe te recevra, tu n'auras donc plus rien. Et cette femme méchante sera assassinée." Cela se réalisa selon les prophéties du vénérable.
La femme qui avait gagné tout pouvoir sur lui, incitait impudemment Moïse au péché. Une fois, elle le fit mettre de force sur le lit, le baisa et l'embrassa, mais ne put éveiller par ses séductions aucune concupiscence en lui. Le bienheureux lui dit: "Tu te fatigues pour rien. Ne pense pas que je sois fou ou impuissant, mais je te méprise comme impure". Quand la femme entendit cela, elle donna l'ordre de lui infliger journellement cent coups. Ensuite, elle commanda secrètement de lui couper les testicules en disant : "Je n'épargne pas ses charmes, afin qu'aucune autre n'en profite." Moïse gisait presque mort par suite de la perte de sang et ne respirait qu'à peine. Mais Boleslav avait honte du comportement d'une femme si noble, et du fait que lui-même l'avait favorisé. Il commençait à persécuter les moines, et les chassait de son pays. Cependant Dieu vengea bientôt ses serviteurs. Une nuit, Boleslav mourut subitement, et dans toute la Pologne, il y eut une grande révolution. Les hommes se soulevèrent et tuèrent leurs évêques et leurs boyards, ainsi que le relate le chroniqueur. En ce temps, cette femme fut aussi assassinée.
Le vénérable, une fois guéri de ses blessures, se rendit près de la Mère de Dieu, dans le monastère des Grottes, en portant ses blessures de martyr et la couronne de la confession comme un héros et un vainqueur au nom du Christ. Et le Seigneur lui accorda la domination sur les passions. Une fois, un frère fut tenté par l'impureté et se rendit auprès du vénérable, lui demandant de l'aide: "Si tu me conseilles quelque chose, disait-il, je l'observerai jusqu'à ma mort comme un voeu." Le bienheureux lui dit alors: "Jamais de ta vie n'adresse la parole à une femme". Il le lui promit avec joie. Le saint, qui ne pouvait pas encore bien marcher à cause de ses blessures, portait dans sa main un bâton avec lequel il toucha le ventre du frère. Alors les membres de celui-ci moururent, et il ne fut plus tenté. Cela est écrit dans la légende de notre saint père Antoine. Il s'endormit en Dieu et dans la foi ferme après avoir passé dix ans au monastère. En captivité, il souffrit cinq ans dans les liens, et la sixième année à cause de sa chasteté.
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