Saint Léon de Bayonne 2
Saint Léon de Bayonne
et ses deux frères Gervais et Philippe
Archevêque de Rouen et Martyr, patron du Diocèse de Bayonne
+ Vers 900
Fête le 1er mars
Saint Léon est un de ces évêques qu'on peut appeler apostoliques, non-seulement à cause de sa sainte vie, mais aussi pour l'ardeur et l'immensité de son zèle. Il naquit à Carentan, petite ville de Normandie. L'histoire nous apprend qu'un ange l'ayant promis à ses parents, ils le reçurent comme un présent du ciel; sa mère, nommée Alice, le mit au monde sans souffrir les douleurs ordinaires de l'enfantement. Son père, un des premiers seigneurs de la province, mécontent, dit-on, du roi Charles le Chauve, alla s'établir, avec sa famille, vers le Rhin, dans les terres qui obéissaient aux frères de ce prince. Dès que Léon eut atteint l'âge de douze ans, il fut envoyé à la cour de Louis dit de Germanie ou de Bavière, qui, après la mort de Louis le Débonnaire, son père, occupa la partie de l'empire français au-delà du Rhin. Mais, voyant que l'atmosphère de la cour et le contact du peuple Germain ne convenaient pas à son fils, il le fit revenir en France, pour étudier dans la nouvelle école que Charlemagne avait fondée à Paris. Léon y fit de grands progrès, et acquit tant de réputation par la vivacité de son esprit, par son éloquence et plus encore par l'éclat de ses vertus, particulièrement de son zèle pour la charité, et de sa ferveur au service de Dieu, qu'il s'attira l'admiration de tout le monde. Son mérite parut encore davantage quand il fut élevé à la prêtrise car son cœur, brûlant d'un désir ardent du salut des âmes, il s'appliqua à la prédication avec tout le succès que l'on pouvait attendre d'un homme tout de feu pour la gloire de son Dieu. Ce grand zèle, qui est le caractère d'un bon pasteur, fit jeter les yeux sur lui pour l'élire archevêque de Rouen. Il fit ce qu'il put pour n'être point chargé de ce fardeau, qu'il jugeait au-dessus de ses forces; mais il n'osa résister à la volonté de Dieu. Le pape (Etienne V) ayant confirmé cette élection, notre Saint y acquiesça enfin malgré les répugnances de son humilité.
Tout cela se passa pendant qu'il était à Rome, où son zèle l'avait conduit, pour demander au souverain Pontife la qualité de prédicateur apostolique. Cependant son épiscopat ne le fit point renoncer à ce glorieux ministère car, s'étant rendu en peu de temps à Rouen et y ayant disposé toutes choses et établi deux vicaires à sa place, il se rendit dans le Labourd et la Navarre où les incursions des Sarrasins et des Normands avaient presque éteint le flambeau de la foi. Il prit pour compagnons de cette généreuse entreprise ses deux frères Philippe et Gervais, auxquels il avait inspiré un semblable dessein et, commençant à prêcher l'Evangile dans un village des Landes, appelé Labouheyre, il convertit d'abord Argare, qui en était le seigneur, et le baptisa avec toute sa famille. De là il s'en alla à Bayonne prêcher sur la place publique, et convertit en un jour sept cent dix-huit personnes; le lendemain il alla au temple et prit pour sujet de sa prédication l'idole du dieu Mars, qui était adoré par ces habitants, nés dans les armes et accoutumés à la guerre. Il s'adressa d'abord à celui qui faisait l'office de sacrificateur, et eut avec lui quelques entretiens pour s'efforcer de le convaincre; mais, voyant son obstination, il se tourna vers le peuple qui se laissait abuser par des superstitions impies et par l'artifice de ce ministre de Satan. Lorsqu'il commençait à parler et à représenter combien il était déraisonnable de donner le titre de dieux à des créatures qui ne méritaient pas même le nom d'hommes, ce qu'il faisait voir par des démonstrations et des raisonnements irréfutables, ces prêtres interrompirent son discours et excitèrent une grande sédition contre lui, pour lui imposer silence. Cela l'obligea de cesser, parce qu'il vit bien que l'on n'était pas alors disposé à l'écouter; mais il fit monter sa prière vers Dieu, et le supplia d'avoir pitié de ce peuple, et de faire un coup de sa puissance pour le désabuser. Après sa prière, comme s'il eût reçu un esprit nouveau, il s'approcha de la statue de Mars, la renversa par terre d'un souffle de sa bouche et la réduisit en poudre ce qui fut cause de la conversion des prêtres et de quelques personnes de diverses conditions.
Depuis, cette ville a toujours conservé la pureté de la foi et persévéré dans la connaissance de l'Evangile aussi nous pouvons l'appeler l'Apôtre de Bayonne; quelques-uns même le mettent au rang des évêques de cette ville. Notre Saint, ayant employé quelque temps à cette entreprise, ne crut pas avoir assez rempli tous les devoirs de son ministère, pour qu'il lui fût permis de se reposer. C'est pourquoi, prenant congé de ses enfants qu'il avait engendrés en Jésus-Christ par la prédication, il passa en Espagne, pour évangéliser la Biscaye et la Navarre; il trouva partout de quoi exercer sa vertu et faire valoir son talent, parce que ces peuples que la nature a cachés dans les recoins des Pyrénées, n'avaient vu qu'à peine le jour de l'Evangile, et que peu de personnes étaient allées jusqu'à eux pour les éclairer. Cependant des pirates de Bayonne, revenant, après une longue absence, dans cette ville, furent surpris de la voir toute changée et les temples renversés. Ils entrèrent dans une grande fureur, surtout en apprenant qu'ils devaient renoncer à leurs pirateries et faire pénitence, et en voyant leurs parents et leurs amis obéir à l'Evangile. Ils conspirèrent contre l'auteur de cette révolution, et allèrent l'attendre en embuscade à son retour d'Espagne. Le Saint prêchait sur les bords de la Nive, lorsque ces forcenés se jettent sur lui, le frappent rudement, égorgent sous ses yeux son frère Gervais, et enfin le massacrent lui-même. On raconte que son sang, en touchant le sol, en fit jaillir une source abondante, et que son tronc saisissant sa tête abattue, la porta à plus d'un mille jusqu'au lieu où il fut enseveli, et où l'on bâtit depuis une chapelle en son honneur. Ses reliques y reçurent l'hommage de la vénération publique jusqu'en 1557. La crainte des protestants, qui désolaient alors le Labourd, les fit transférer dans la cathédrale, et la chapelle elle-même fut abattue quand le maréchal de Vauban éleva les remparts de la citadelle.
On les y gardait avant 1793 dans un magnifique reliquaire d'argent qui coûta 3,000 livres. Un chanoine, M. de Laclaux, en légua 1,000 le reste fut fourni par la ville et par le chapitre. Suivant un ancien usage qui date au moins du xi' siècle et qui s'était conservé presque jusqu'à nous, le jour de Pentecôte, le syndic de Bayonne, partant de la mairie, allait seul à la chapelle, et, après la destruction de la chapelle, à la maison la plus voisine, et en revenait un cierge allumé à la main. A son retour, le corps de ville, précédé du gouverneur et suivi des principaux citoyens, faisait le même pèlerinage, et revenait comme le syndic avec des cierges allumés qu'on allait placer dans le chœur de la cathédrale pieux symbole de la lumière évangélique apportée dans ces contrées par saint Léon. On remarque que, un peu avant sa mort, il demanda à Dieu que les femmes, qui auraient recours à lui pendant leur grossesse, fussent préservées de toutes sortes d'accidents, et qu'il lui recommanda particulièrement la conservation de la ville de Bayonne. Il apparut immédiatement après son martyre à ses grands vicaires de Rouen, et ceux-ci se rendirent aussitôt au lieu de son décès, où ils apprirent tout ce que nous venons de rapporter. Sa fête se célébrait autrefois à Rouen; le nouveau Propre l'a exclu.
Texte extrait des Petits Bollandistes volume III
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