Spiritualité Chrétienne

Spiritualité Chrétienne

Le Serviteur de Dieu Basilio Rueda Guzmán

Frère Basilio Rueda Guzmán

Un saint parmi nous

1924-1996


Introduction


Dans un monde dominé par le matérialisme, l’individualisme, l’hédonisme et le manque de solidarité et où les valeurs de l’Eglise catholique sont mises en accusation, nous avons besoin de modèles qui soient proches de nous et qui nous montrent qu’il est possible d’être saint malgré un milieu hostile à tout ce qui est spirituel et transcendant. Nous avons besoin de modèles qui nous disent que Jésus est, aujourd’hui et toujours, le centre de notre vie, capable de répondre aux aspirations de tout être humain. La vie du Frère Basilio Rueda Guzmán a été une louange au Seigneur, un hymne aux œuvres de ses mains. Son union à Dieu a brisé les moules de l’activisme débordant qui nous envahit et elle l’a projeté vers le service des hommes, en dépit de l’égoïsme dominant. Sa vie spirituelle fut un chemin de don progressif à Dieu et à ses frères dans les années qui ont suivi le Concile Vatican II et qui devaient préparer les fidèles à participer à la rénovation de l’Eglise et de la vie religieuse. Un jour il comprit qu’il pouvait être Frère Mariste et il se mit à l’œuvre pour le devenir malgré l’hostilité de son père. Cela lui a demandé de nombreuses heures de jeûne, de larmes, de prières insistantes auprès de la Vierge Marie à laquelle il professait une dévotion singulière dès sa plus tendre enfance. Quand son objectif fut atteint, sa vie prit le chemin de la sainteté, comme le disait Marcellin Champagnat : « Se faire Frère c’est s’engager à se faire saint ! » Le Frère Basilio prit très au sérieux cet idéal et toute sa vie il s’efforça d’en faire une réalité. Il eut la chance de rencontrer, dès ses premiers pas dans la vie religieuse, un directeur spirituel excellent parmi les aumôniers de la maison de formation de Quéretaro. C’est dans cette maison qu’il fit sa formation apostolique.


Un homme séduit par Jésus Christ


D’accord avec son directeur spirituel, il portait dans un petit calepin ses résolutions, parmi lesquelles nous trouvons : « Me conformer progressivement à l’image de Jésus Christ et j’obtiendrai cela en aimant sa personne, dans une vraie obéissance, dans la pauvreté totale, dans la virginité du cœur, sous l’action de l’Esprit Saint ». « Je veux que ma vie soit un cri d’amour vers toi, qui es mon tout. Que tout mon être te dise, Seigneur, que je veux vivre pour toi, que je t’aime, parce que tu es infiniment aimable, parce que tu es immensément digne d’amour. Fais que je comprenne cet amour pour que je t’aime de plus en plus. » « Jésus, conduis-moi jusqu’où ont été tes saints, même si cela veut dire immolation, humiliation, pauvreté, en un mot, douleur et croix. Ne m’abandonne pas à mes propres forces, fais que je sois totalement à toi, deviens mon maître, fais-moi brûler de ton amour. » Selon le témoignage de ceux qui l’ont connu, le Frère Basilio avait le cœur séduit par Jésus Christ. Il insistait beaucoup dans la recherche d’une intimité profonde avec le Seigneur, de sorte à le rendre présent dans toute notre activité. C’était édifiant de le voir en adoration devant le Saint Sacrement. Dans son agenda de retraite de 1986 il écrivait : « Tout me porte à centrer l’attention et l’amour sur la personne merveilleuse de Jésus Christ, que je veux connaître. C’est la grâce que sans cesse je demande. » Dans le pèlerinage qu’il fit en Terre Sainte, après ses deux mandats comme Supérieur général, il avait l’habitude d’aller, accompagné d’un ami prêtre, au Calvaire et au Mont des Oliviers, pour prier. Sur place, il enlevait ses souliers, les mettait de côté, et, à genou, il passait de longues heures, immobile, en profonde contemplation. Tous les jours il faisait une heure d’adoration, malgré un emploi du temps chargé. Il ne passait aucun jour sans participer à l’Eucharistie, centre de sa journée. Sa conviction était que « les premières heures du jours sont pour le Seigneur ». Quand il se trouvait dans le Mouvement pour le Monde Meilleur à Quito, Equateur, les Sœurs du Bon Pasteur, qui accueillaient l’équipe de coordination, disaient : « Avant l’aube il se trouvait déjà à la chapelle et il y restait des heures avec le Seigneur et avec la Vierge Marie. Son expérience de Dieu faisait sa plus grande richesse et on la percevait dans ses relations avec les personnes, sans tenir compte de leur credo ou de leur position sociale. Il fut un homme de Dieu, un disciple total de Jésus, un séduit de l’évangile. Un jour il dit à un groupe de jeunes : « Cela vaut la peine de vivre pour un idéal, et aucun idéal n’est aussi passionnant que Jésus-Christ ! » Dans une entrevue qu’il accorda pour une revue religieuse il dit : « Un jour j’ai compris que Dieu avait rendu son amour tangible dans la personne de son Fils et Jésus était comme le baiser d’amour et de tendresse que le Père nous donnait… Ce jour-là je compris que Jésus s’adressait à moi de manière particulière, puisqu’il me faisait comprendre l’excellence de son Evangile. » Au cours de la retraite spirituelle de son année sabbatique, il écrivait dans son agenda: « Le Seigneur me fait don d’une des plus belles méditations de ma vie. C’est une grâce ineffable. De chaque verset coulent non seulement des torrents d’affection et d’amour, mais de lumière, une lumière telle que je n’avais jamais reçue de ma vie. Je comprends l’appel, l’appel qui m’est fait, comme un acte de tendresse du Christ. Mais, ce n’est pas pour m’accaparer pour Lui, c’est plutôt pour m’envoyer au cœur et aux carrefours du monde pour crier : « Consolation ! », mais avec une valeur et un ton nouveau. C’est maintenant que je saisis le sens exigeant de ma consécration et de mon devoir vivre en payant le prix fort et de la grâce réciproque, payée aussi à prix fort. »


L’homme contemplatif


Quelqu’un qui connaissait le Frère Basilio pour avoir travaillé avec lui, s’exprimait ainsi : « Son union à Dieu est un secret entre lui et le bon Dieu, bien que cela pouvait se deviner dans sa conduite, dans ses écrits, comme aussi dans la vie fraternelle qu’il faisait régner dans le Conseil général ». Par rapport à sa vie débordante, le Frère Basilio disait, après s’être retiré : « Ceci me paraît un petit paradis de paix avec ses larges espaces pour la prière ». Il conseilla à un Frère qui se plaignait de n’avoir pas de temps pour la prière : « Laisse-moi te dire que ce n’est pas le temps qui te manque, mais l’amour. Personne ne nous rendra plus sensibles au monde et à ses besoins que de le voir avec les yeux de Jésus et pour cela nous devons l’avoir dans notre esprit et dans notre cœur. » Dans une autre occasion il reconnaissait : « Parfois j’arrive à quatre heures du matin et je pense qu’il ne vaut pas la peine d’aller me coucher pour une heure. Alors je vais à la chapelle pour un moment d’adoration.» Le Frère Basilio fit les Exercices de saint Ignace à Cuernavaca, en avril 1986. Le prêtre jésuite qui l’accompagnait peut dire : « Mon témoignage est le fruit d’une direction spirituelle et d’un contact intime de trente jours. Deux aspects m’ont profondément impressionné : le premier c’est le don de la prière. Sa prière était profonde, originale, sincère et spontanée. Elle révélait un homme possédé par Dieu. Jamais il n’a montré avoir eu un moment d’aridité ou d’ennui, tout au contraire. Son recueillement était tel qu’il laissait voir une profonde familiarité avec Dieu. En plus, il fit une confession générale telle, qu’il m’édifia et me permit de constater combien le Seigneur avait finement travaillé son âme. » Au cours de cette même retraite il écrit : « Je prie, je fais des efforts et après une demi-heure j’entre dans une contemplation très riche. Les cinquante dernières minutes sont d’une grande union avec le Seigneur souffrant, une contemplation de ses terribles douleurs. Le fait du bon larron m’a beaucoup impressionné… C’est merveilleux de croire en Jésus quand presque tous ont succombé dans leur foi. »


Un homme attentif à accomplir la volonté de Dieu


La prière du Frère Basilio ne consistait pas dans de beaux discours, ni dans des moments de silence, mais dans la recherche ardente de la volonté de Dieu. Il affirmait, en effet : « Aimer la volonté de Dieu et jamais la craindre, puisque la volonté de Dieu est aimable parce qu’il nous aime. » Dans une autre occasion il faisait le commentaire suivant : « Le monde d’aujourd’hui frappe à la porte de notre Institut. Dieu veut que nous ne la fermions pas. Que la gloire de Dieu et l’honneur de la Vierge Marie soient notre unique but et toute notre ambition. » Il a compris que le Royaume de Dieu est vie, amour, justice. Beaucoup de Frères sont convaincus que toute sa vie a été un travail et une fatigue pour le Royaume de Dieu. C’était un homme profondément spirituel et avec un sens de Dieu très fort. Il vivait dans un contact constant avec Lui. Dans une occasion il écrivit : « Dieu ne veut pas que je cherche ma réalisation personnelle au dépend de mon frère. Ce que Dieu veut c’est que nous nous aimions comme frères et que nous nous sanctifions ensemble. » Au début d’une retraite il se proposa ce qui suit : « Revoir ma vie suivant la volonté de Dieu. Je veux absolument que mon vouloir se plie à la volonté de Dieu. » « Dans l’écoute attentive de la parole de Dieu, disait-il, naît le dialogue qui fait jaillir le besoin véhément de proclamer avec la vie que Dieu est plénitude d’amour et qu’il vaut la peine de tout perdre pour le posséder. C’est ici que trouve son origine une recherche passionnée de la volonté de Dieu, dans une communion ecclésiale généreuse et indispensable, dans l’amour de la vérité, pour trouver de nouveaux chemins d’évangélisation. Celui qui a connu la fascination de l’amour de Dieu sait qu’il ne s’appartient plus… la volonté de Dieu passe avant tout, avant le moi et le désir se réduit à une disponibilité absolue. » Durant ses exercices de saint Ignace, il note : « Je vois que Dieu me donne le siège pour une ‘reddition inconditionnelle’. C’est difficile de mettre dans un paragraphe tout ce que cela implique dans la marche de ma vocation, de ma vie et de ma retraite, il s’agit d’une réorganisation pour la conduire vraiment au sommet. Je devine que cela est très sérieux et très engageant, mais je reste en paix. Si je tombe dans un piège, c’est dans le piège de Dieu. Qu’est-ce qui peut m’arriver de mieux ? Qu’est-ce que je peux désirer de plus ? » Durant sa dernière maladie et jusqu’au dernier moment, il n’a jamais cessé de se mettre à la disposition de la volonté de Dieu : « J’éprouve une grande paix et totalement abandonné à Dieu. Je ne veux pour moi, dans les circonstances où je me trouve, que la sainte volonté de Dieu. Personne ne m’aime autant que Lui et personne ne sait mieux que Lui ce qui nous convient… Je sais qu’il n’y a pas de meilleures mains que les siennes, et c’est à elles que je m’en suis remis. Je ne prie pas pour ma santé, mais pour que la volonté de Dieu s’accomplisse jusqu’à la fin. » Quelqu’un qui l’accompagnait en ces moments nous dit : « Sur son lit de mort, avec une résignation exemplaire et le sourire sur les lèvres, il nous conduisait au Seigneur avec son exemple de don total à la volonté de Dieu. » Ses dernières paroles ont été : « Que ta volonté soit faite », et celles de Charles de Foucauld qu’il admirait beaucoup : « Père, je me remets entre vos mains, faites de moi ce que vous voulez… » Il avait déjà formulé de façon résolue : « La volonté de Dieu, quelle qu’elle soit et que j’accepte d’avance, doit être la parole dernière et la source de la paix. »


Un homme rempli de l’amour de l’Eglise


Il affirmait, parlant de la fidélité : « Nous devons être fidèles à Dieu, à l’Eglise, à l’humanité et à nous-mêmes ; nous ne pouvons pas faire défaut à Dieu. » Il insistait avec fréquence que nous devions être fidèles à Dieu, à l’Esprit et à l’Eglise. Il ne se limitait pas à la communauté mariste, au contraire, il conseillait aux Frères de s’intégrer dans les trois dimensions de l’Eglise : la paroisse, le diocèse et l’Eglise universelle. La fidélité à l’Eglise a été une de ses caractéristiques et dans ses causeries, conférences ou écrits, il exprimait cela avec une conviction contagieuse. Dans une certaine occasion on l’a entendu dire : « S’il y avait à sauver quelque congrégation religieuse, je sauverais d’abord la nôtre, pour laquelle j’éprouve un amour viscéral ; mais, si pour sauver l’Eglise il fallait sacrifier une congrégation, je voudrais que ce soit mon Institut et que je meure et sois enterré avec lui. » Pendant de nombreuses années il servit l’Eglise dans le Mouvement pour un Monde Meilleur et par la suite dans l’Union des Supérieurs Majeurs, et, parfois, sur quelque point particulier, comme participant au Synode pour la Famille ou comme consulteur de la Sacrée Congrégation des Religieux. Un des supérieurs généraux affirme : « Le Frère Basilio a été un appui et une garantie pour ceux qui voulaient la rénovation de la vie consacrée, suivant les orientations de l’Eglise. Fidèle administrateur des dons de Dieu, il fut un vrai disciple du Christ dans son Eglise. » Dans le Synode de la famille il affirma quelque chose qui attira puissamment l’attention : « Je crois que nous devons écouter. Les familles ont beaucoup à nous dire. » On a fait noter que le Frère Basilio embrassa, dans son travail évangélique dans le monde et dans l’Eglise, bien des domaines d’apostolat : avec les prêtres et les religieux, mais il manifesta aussi une prédilection spéciale pour les laïcs, dans les diverses organisations avec lesquelles il était entré en contact. A la mort du Frère Basilio, le président du Mouvement pour un Monde Meilleur, son ancien collaborateur, disait : « Je le rappelle avec affection pour son amour de l’Eglise, son amour de l’Institut, pour sa loyauté et sincérité, sa cohérence et sa bonté et pour son ouverture à toutes les nouveautés de l’Esprit et à la rénovation de l’Eglise. » Sur le Frère Basilio, la pensée de l’évêque de Velletri était la suivante : « Je savais que c’était un auteur sûr pour la vie spirituelle et ascétique et c’était avec joie que je lisais ses livres sur la prière, la communauté religieuse, la charité fraternelle, y puisant lumière, réconfort et profit spirituel. » Pendant une de ses conférences, un assistant commentait : « J’en étais ébaubi. Nous avions devant nous un homme qui montrait une vraie passion pour l’Eglise, pour la vie religieuse et pour sa congrégation. » Le Frère Basilio lui-même reconnaissait : « Chaque jour je trouve davantage de raisons pour vivre la vie que j’ai embrassée avec un attachement plus fort pour l’Institut que je sens très vivant en moi, comme aussi pour l’Eglise que j’aime tous les jours davantage. »


Frère parmi les Frères


S’il y a un point sur lequel tout le monde est d’accord pour parler du Frère Basilio, c’est bien de son amour envers les Frères de sa communauté et pour tout homme, chrétien ou non, qui venait à croiser son chemin. Il aimait tout le monde de manière concrète, et tout le monde se sentait aimé comme s’il était unique. Quand il s’agissait d’aider quelqu’un il en prenait tous les moyens. Il avait comme un souci maternel de la santé des autres, et nous ne sommes pas en train d’exagérer. Il avait à un degré rare l’amour du frère, il était même capable de mourir pour sauver l’autre, se livrant lui-même, comme le fit Jésus. Sa grande délicatesse le faisait proche de tous et sa charité devenait compassion. Il était toujours attentif pour prêter son aide et pour dire un mot de réconfort. Voici comment quelqu’un s’est exprimé : « J’ai découvert un homme auquel je pouvais me confier totalement sans être déçu, quelqu’un qui comprenait, qui soutenait, qui savait se mettre à votre place. » Les Frères anciens se rappelleront toujours sa tendresse et sa délicatesse ; les jeunes, sa grande compréhension et l’appui qu’ils trouvaient alors même qu’il n’était pas d’accord avec leur conduite. Après sa réélection pour neuf autres années comme Supérieur général, à la fin du Chapitre il dit aux Frères : « Dites à tous les Frères que je les aime et que je vais me mettre à leur service de toutes mes forces. » Il servait ses Frères avec le sourire aux lèvres, sans leur donner l’impression qu’ils étaient servis. Il ne donnait jamais signe d’inattention et il ne laissait pas de s’intéresser à ce qu’on lui disait ou confiait ; il restait à la disposition de tous, tout le temps que c’était nécessaire. Son style d’accueil fraternel et de don de soi n’étaient pas des moments sporadiques, mais une manière naturelle et ordinaire de se comporter. Il éprouvait une grande préoccupation pour les Frères en crise de vocation et qui demandaient la dispense des vœux. Avant de transmettre la demande au Vatican, il étudiait encore une fois le cas avec le Procureur auprès du Saint Siège. Au Frère en crise il faisait la demande suivante : « Est-ce que tu voudrais continuer à être Frère ? » Si la réponse était affirmative et sincère, il remuait la terre et le ciel pour lui procurer la possibilité de refaire la vie, lui offrant tous les recours psychologiques et la direction spirituelle, ou bien des cours sur la prière, ou encore l’accompagnement. Un jour qu’il était de passage dans une ville d’Espagne, il s’informa d’une cousine d’un Frère déjà mort qu’il connaissait. Elle avait un cancer et le Frère demanda qu’on le conduisit chez elle pour la visiter. La dame se trouva tellement réconfortée par la visite qu’elle ne trouvait pas les paroles pour le remercier d’une telle délicatesse. Dans une autre occasion, alors qu’il était maître des novices à Morelia, il accueillit et s’occupa d’un homme de Chiapas pendant sa convalescence, le remplissant de ses attentions et de son affection. Dans une visite aux Frères de Nairobi, il visita une léproserie tenue par des religieuses. Il y avait là une femme sans mains ni pieds et qui en plus était aveugle et sourde. On demanda à cette femme de chanter devant ses visiteurs et elle le fit en remerciant Dieu pour les dons reçus. Le Frère Basilio en fut profondément ému, il embrassa et baisa cette femme. Un Frère nous a laissé ce témoignage : « Nous avions quitté le second noviciat, en Espagne, et nous nous dirigions vers une autre ville. Il faisait nuit. Dans le fossé qui longe la route nous avons vu un homme étendu. Le Frère Basilio a demandé au chauffeur de s’arrêter, et nous avons conduit cet homme à la maison jusqu’à ce qu’il se reprenne totalement. Cet homme retourna chez lui trois jours après. Avant le XIXème Chapitre général, le Frère Basilio retourna en Afrique en un voyage de solidarité. Dans une communauté de Frères, en Tanzanie, il soigna un enfant qui avait la tête couverte de plaies à cause de l’infection. Cet enfant, qui avant ne s’était laissé soigner par personne, le Frère Basilio, alors qu’il ne savait pas la langue, arriva à le soigner. Tous les jours il s’était imposé de lui nettoyer les plaies avec délicatesse, et il le fit tout le temps qu’il resta dans cette école, et l’enfant fut guéri.


Un homme d’un grand esprit de foi


Dans un groupe œcuménique de la ville de Mexico, dont le Frère Basilio faisait partie, quelqu’un dit de lui : « Il dialoguait s’exprimant avec le langage de ses interlocuteurs et il impressionnait les non-croyants du groupe par la manière dont il présentait la foi, il les frappait surtout par son témoignage et par la manière dont il présentait la relation à Dieu. » La foi du Frère Basilio était comme une roche solide sur laquelle se cimentait et se construisait l’édifice de sa vie spirituelle. C’est de la foi que jaillissait cet amour qui se manifestait dans ses manières et dans la chaleur de ses paroles, dans ses prières et dans l’adoration du Saint Sacrement et plus encore dans la célébration de l’Eucharistie. Sa vie de prière, sa profonde confiance en Dieu, son grand amour pour la Très Sainte Vierge, la paix, la joie et le magnifique accompagnement de ses Frères étaient des preuves de sa foi. Il n’était pas rare de le trouver à la chapelle devant le Saint Sacrement, très simplement et avec une dévotion admirable. Dans les moments les plus difficiles de l’histoire de l’Institut, sa foi inébranlable dans la Providence, l’a maintenu à la tête de ses Frères quand ils en avaient le plus besoin. Il voulait que tous les Frères vivent en paix. Il disait qu’on ne peut pas servir Dieu vraiment si ce n’est dans la joie de la foi. Il insistait : « Etre fidèle, c’est possible ! » Et c’est ainsi qu’il fut lui-même : fidèle, saint, joyeux, farceur. Son esprit de foi et sa grande confiance dans la Providence étaient transparents. Il croyait fermement dans l’efficacité de la prière, quand il s’agissait de la mission garantie par l’obéissance. C’était un homme de foi profonde qui se maintenait serein devant les abandons de la vie religieuse, les erreurs ou les impatiences de beaucoup de Frères qui, après le Concile, voulaient des réformes immédiates. Bien que le tiers des Frères de la Congrégation ait abandonné la vie religieuse pendant son gouvernement, il resta inébranlable et sut toujours garder le même enthousiasme. Il était sûr que l’œuvre de Dieu allait continuer malgré les tempêtes. C’était un temps orageux pour l’Eglise et pour toutes les congrégations et la nôtre n’y fit pas exception. Le Frère Basilio ne se laissa pas abattre et il mit en marche ce qu’il appela lui-même « le processus de refondation de l’Institut. »


Un homme d’une grande force


Le Frère Basilio fit preuve d’égalité d’humeur devant les vicissitudes des temps, avec la confiance mise dans la Providence. Sa profonde vie intérieure lui permit d’affronter avec sérénité les avatars de tant d’esprits affectés par l’insécurité des moments difficiles. Il vivait sans se laisser entraîner par les problèmes des autres ou de sa propre congrégation. Il ne se laissa jamais décourager en constatant la diminution constante du nombre des Frères. Malgré un travail énorme, on ne l’a jamais vu altéré ; l’égalité d’humeur était comme l’ombre de sa personne, c’était comme un ami qui marchait à ses côtés. Un de ses novices se rendit compte que depuis quelque temps il souffrait, « mais il restait toujours joyeux ; il ne se lamentait pas, jusqu’à ce que vraiment il n’en pouvait plus. Il ne se plaignait pas, il continuait à vivre, à servir, nous aimant et nous servant en toute chose. » Un autre novice disait : « Ce que j’ai le plus admiré ce fut sa patience, sa compréhension, son amour, - plus par son exemple que par ses paroles -, la manière dont il nous traitait, comme en famille, et la joie dont il faisait toujours preuve. » Etudier, prier, se reposer, écouter de la musique, laver les assiettes, jouer aux cartes, programmer des voyages, il faisait tout cela avec grande attention ; il vivait intensément chaque moment, attentif aux autres. Il joignait la douceur à la force, la prudence à l’audace, le respect aux saines traditions et la créativité, non seulement pour ce qui regardait les structures, mais même dans la conception de la vie spirituelle et de l’organisation de tout l’Institut. Quiconque a vécu avec le Frère Basilio sait qu’il ne s’est jamais laissé vaincre par la fatigue ou la maladie. Il donnait l’impression que la douleur et la souffrance lui étaient naturels. « Mais pour moi, dit un Frère qui l’a vu dans son lit de douleur, il me fut insupportable de voir la souffrance qui se marquait sur son visage, malgré les efforts qu’il faisait pour la contrôler. » Pendant sa maladie, le Frère Basilio disait que les moments les plus difficiles étaient quand il fallait prier, à cause des médicaments et des sondes. Cependant, il offrait ses souffrances pour l’Institut, pour l’Eglise qui avait été pour lui tellement généreuse et pour ses novices.


Un homme prudent


Quand, au cours du XVIIème Chapitre général, le fait de sa réélection devint une chose possible, le Frère Basilio, depuis Rome, appela son médecin personnel qui résidait à Madrid, pour savoir si son état de santé lui permettait d’affronter un second mandat. Le médecin nous raconte ce qui est arrivé : « Nous avons parlé calmement, dans les détails, et il me demanda : Est-ce que physiquement je suis dans les dispositions ? Je lui ai répondu : « Je pense que oui ». Et il mena a terme son second mandat sans complications majeures. Si je lui avait dit que non, il aurait accepté tout de même parce qu’il était prêt à se sacrifier pour tous et il était toujours disposé à servir, vu que la confiance que la Congrégation mettait en lui avait pour lui beaucoup de valeur. » Bien qu’il y eut une polarisation dans l’Institut, due aux nouveaux courants de rénovation, il n’y eut jamais de confrontation de groupes ; c’était dû au grand sens de l’optimisme, à la confiance et à la force du Frère Basilio dans les pires moments. C’était un homme qui, avant de donner une réponse, en avait déjà parlé avec Dieu et il acceptait le point de vue de l’autre, même s’il n’était pas toujours d’accord. Le contact et la proximité avec lui conduisaient à la prière et la prière conduisait à la vraie science qui vient de Dieu. Il fut un homme respectueux de la conscience des autres. Aux Frères d’Afrique, dans les moments les plus difficiles de la guerre, il leur laissait une liberté totale pour rester ou pour retourner au pays d’origine. Dans des situations compliquées, il savait appliquer les principes de la morale et du discernement. Il était un guide précis et clair, et il voulait que les supérieurs régionaux le fussent aussi. Il savait unir trois aspects difficiles du gouvernement : le respect de la personne, les exigences de la vocation religieuse et le service de l’autorité dans la prise de décisions. Il abordait toutes les affaires avec sagesse, patience et sympathie et il cherchait la meilleure solution. Il sut éviter des écueils extrêmement dangereux, comme suivre une ligne d’action excessivement conservatrice ou perdre le contrôle devant une ouverture qui permettait de nouvelles expériences qui auraient pu provoquer rupture et confusion. Son aptitude à s’informer et à demander des informations, aide 0et conseil opportun, le maintenaient en contact constant avec le Conseil général. Il n’y eut jamais de précipitation dans ses décisions et si, par manque d’information ou par la mauvaise volonté des personnes, il prenait quelque décision peu correcte, il la corrigeait, et si c’était nécessaire il demandait pardon et changeait de direction. Il savait mettre chacun devant ses responsabilités, l’appelant à une vie consciente et mûre et à l’accomplissement des vœux. Il savait le faire avec les paroles et avec l’exemple, toujours en vue d’une solution. Le Frère Basilio a vécu et est mort comme un timonier, comme un capitaine à la main ferme mais au cœur plein de bonté. Il savait pour quoi et pour qui il vivait, pour quoi et pour qui il travaillait, et dans les mains de qui il mourait.


Un homme humble


Avec sa capacité d’organisation, ses grandes connaissances, la prudence dans le discernement et l’admiration que les gens lui portaient, le Frère Basilio a toujours conservé un cœur simple, modeste et humble. « Son humilité, reconnaît quelqu’un qui a vécu avec lui durant une retraite spirituelle, était une constante, comme sa vie d’oraison. J’avais devant moi un homme exceptionnel, et cependant il était très naturel et très simple. C’était un homme simplifié et transparent. J’ai remarqué son humilité comme une nuance très délicate que l’Esprit Saint avait travaillée en lui. » L’humilité conduisait le Frère Basilio à faire des tâches que personne ou très peu de personnes attendaient d’un Supérieur général, comme laver le linge, faire la vaisselle, balayer son bureau, se charger des valises des voyageurs et servir à table. Il n’était pas rare de le voir occupé aux travaux de la maison. Il avait un grand sens de la pauvreté évangélique et l’exemple de son humilité attirait. Il disait qu’il était inconcevable qu’une communauté mariste fête la Noël sans penser aux pauvres. Lors d’un de ses anniversaires on lui offrit un magnétophone pour l’étude de l’anglais. Il le refusa disant qu’il n’avait pas besoin d’un appareil semblable. Mais lui se préoccupait que personne ne manqua du nécessaire et même du convenable. Chez le Frère Basilio, le vœu de pauvreté était comme la synthèse des deux autres. Comme Jésus et Marie, il se dépouilla de tout pour le bien des autres. Il se contentait du stricte nécessaire. Il était un exemple pour tous et un témoin de la vraie suite du Christ. Un prêtre qui a connu le Frère Basilio s’exprime ainsi : « On m’a dit qu’on prétend introduire « sa cause. » Moi, je n’y avais jamais pensé, et pourtant, si ! Je pense que les saints devaient être ainsi. Je n’ai aucun doute de sa sainteté, il a accompli sa mission avec un grand naturel, un amour immense pour l’Eglise, avec beaucoup de responsabilité et un grand sens de Dieu. » Un autre ajoute : « L’idée que je me suis faite de lui c’est que c’était un homme totalement centré sur Dieu, simple et sans déviation. Je n’ai jamais rencontré autant d’intégrité et de don de soi. Dans ma pensée et dans mon cœur je n’ai aucun doute : c’était certainement un saint. » Un évêque, qui avait connu le Frère Basilio à Rome, s’exprimait ainsi devant un groupe de Frères étudiants : « Vous avez dans le Frère Basilio un homme hors du commun. Sa vie est une richesse dans l’histoire dramatique de l’Eglise et du monde post-conciliaire. Le Frère Basilio est un témoin parfait de la vie chrétienne dans la deuxième moitié du XXème siècle, et en plus, il y a ses écrits qui sont une richesse de vie religieuse et spirituelle ».


Amour filial de la Très Sainte Vierge


Dès son enfance, le Frère Basilio s’est distingué par une tendre et filiale dévotion à la Très Sainte Vierge. Dans les maisons de formation, son amour pour la Bonne Mère, encouragé par quelques-uns de ses formateurs, devint remarquable. Pendant la célébration de l’année mariale de 1954, alors qu’il était directeur de la maison de formation, il organisa, avec les aspirants à la vie religieuse « des cercles d’études » pour connaître et aimer davantage la Vierge Marie. Pendant ses années d’apostolat dans les Cursillos de Cristiandad, il donnait des conférences sur la Vierge Marie, et il le faisait de telle sorte que ses auditeurs restaient agréablement impressionnés. Comme Supérieur général, il encourageait tous les Frères à rester fidèles aux traditions mariales de l’Institut. Sa pensée sur la Très Sainte Vierge était excellente car elle partait d’un christocentrisme passionné. Sa circulaire Un Nouvel espace pour Marie, fut écrite avec un cœur de fils et elle exprima comme l’âme collective du Frère Mariste envers celle « qui avait tout fait chez nous », comme disait notre saint fondateur, Marcellin Champagnat. Responsable du Mouvement Champagnat de la Famille Mariste, il mit tout son engagement pour que la Mère de Dieu soit connue et aimée par ceux qui voulaient partager la spiritualité mariste dans le style de Nazareth. Dans ses notes sur les Exercices spirituels de saint Ignace il écrivit : « La nuit, une douce prière mariale. Un chapelet ‘pour les miens’ et un autre pour cette renaissance mariale et pour la grâce de parler de Marie aux Frères, les 17 et 18 ». Dans un autre paragraphe il ajoutait : « Après le souper, l’office et après, en me promenant, la prière avec Marie et le chapelet, récité tranquillement, malgré la nuit et la fatigue, constituent un beau moment spirituel. » A la clôture du XXème Chapitre général, il est choisi à l’unanimité pour faire la consécration mariste à la Très Sainte Vierge. Il composa une belle prière qui émut tous les capitulants et il la lut devant la statue de Marie. « … Sainte Marie, Mère de Dieu, réunis en Chapitre, nous venons aujourd’hui déposer dans tes mains et dans ton cœur de Mère notre gratitude, nos espoirs et nos projets pour que tu les présentes au Seigneur. Notre monde, notre Eglise et notre Congrégation doivent affronter des problèmes, des besoins urgents. La tâche que nous a confiée l’Esprit Saint, à travers le charisme de Marcellin, est plus passionnante que jamais. Aide-nous à la découvrir, à la situer, à l’accomplir et à être, comme toi, pour la jeunesse, des signes vivants de la tendresse du Père et du cœur maternel de l’Eglise. »


Pour conclure…


Il n’y a pas de doute qu’un homme qui pousse à la générosité, qui éveille l’admiration, ne peut que provoquer des commentaires laudatifs : il fut un prophète de son temps, un intellectuel de grande intelligence, un cœur magnanime qui n’a pas connu de frontières, un homme totalement maître de soi, un mystique dans l’action, un Supérieur général exceptionnel, un homme simple, transparent, qui aimait les farces et avait un grand sens de l’humour, d’une spiritualité solide et sûre. Frère simple, qui savait aussi bien recevoir le doctorat honoris causa que se mettre le tablier avec joie et un grand esprit de service pour laver les assiettes ou pour balayer. Il vécut une « vie ordinaire » qui était la volonté de Dieu, toute sanctifiée par la grâce de Dieu.


Repères biographiques


1924: le 16 octobre : Le Frère Basilio naît à Acatlán de Juarez, Mexique. Il est le quatrième enfant de la famille et au baptême il reçoit les noms de José Basilio. Il n’a que quatre ans quand il perd sa maman.


1942: Au mois de juillet, il entre au juvénat des Frères Maristes à Tlalpán. Il émet ses premiers vœux le 8 décembre 1944 et fait sa profession perpétuelle le 1er janvier 1950.


1947: Il débute sa carrière apostolique, enthousiasme les élèves, crée entre eux et parmi ses collaborateurs une ambiance de saine émulation et s’insère tout de suite dans les groupes d’action catholique, d’animation de la catéchèse dans les quartiers populaires. Il joue un rôle important dans l’organisation des « Cursillos de Cristianidad ». En même temps, il continue ses études de philosophie et, le 17 décembre 1961, soutient sa thèse de maîtrise en philosophie sur le thème: « Être et Valeur ». Une vraie thèse de doctorat, au dire des professeurs. Entre temps il aura été professeur au juvénat de Querétaro, puis directeur de 1955 à 1957. Il terminera cette période initiale de son apostolat comme professeur au CUM (Centre Universitaire Mariste). Ses études universitaires, sa participation active aux Cursillos, les cours de philosophie qu’il a donné chez les Jésuites, sont sa première ouverture sur un monde plus vaste que l’horizon mariste et révèlent déjà son audace apostolique. Rappelons aussi que Basilio va se dire fils spirituel de son professeur Oswaldo Robles, un laïc d’une vie spirituelle exceptionnelle. Ainsi Basilio ajoute à son filon mariste celui d’un homme universel.


1960-1964: Il est membre de l’équipe du Père Ricardo Lombardi dans le mouvement « Monde Meilleur ». En Équateur, il sera le principal responsable, donnant retraites et conférences très appréciées par les auditoires les plus divers : ouvriers, politiciens, gens d’église et personnes consacrées. Ses conférences devenaient un défi pour religieux, prêtres, évêques et politiciens à se dépasser, à s’enthousiasmer pour le bien. Il sillonne aussi les pays voisins : Colombie, Vénézuéla, Chili…Il prend l’habitude de traiter des problèmes nationaux, internationaux, politiques, économiques, religieux, et de faire passer dans son équipe et ses auditoires les idées de Vatican II. Pour lui et pour notre Congrégation c’est un moment de grâce remarquable : Basilio, notre futur Supérieur Général apprend à respirer avec les poumons de l’Église et du monde, à mesurer les hommes et les problèmes sur des horizons très larges. Bien que travaillant hors de l’Institut, et étant, lui, Frère, directeur d’une équipe sacerdotale, il affirme constamment son appartenance inconditionnelle à la Congrégation. La fibre mariste sera toujours très forte dans âme de Basilio.


1965-1967: Il est nommé Directeur du Second Noviciat, en Espagne, à Sigüenza, d’abord, puis à l’Escorial. Il révolutionne les cours par des apports modernes, par plus d’humanité, un meilleur centrage sur l’Evangile, l’ouverture aux appels du Concile et aux problèmes d’un monde. En fait il transfère l’esprit et l’expérience que lui avait donnés le Monde Meilleur dans ce centre de formation de Maristes adultes et responsables. Les Seconds Novices sont enthousiastes de lui, ils trouvent en lui quelqu’un qui leur ouvre des autoroutes intellectuelles et apostoliques dans un monde en pleine mutation. Par ailleurs Basilio reste simple, cordial, attentif aux gestes humains, prompt à l’humour. Il a l’art de détendre la situation. Ses succès en tous domaines lui valent d’être nommé délégué au Chapitre général de 1967.


1967: Le 24 septembre, il est élu Supérieur Général pour une première période de 9 ans. Ce fut une surprise et une joie. Surprise car il n’avait à sa disposition aucun des atouts classiques pour devenir Supérieur, il n’avait été ni Conseiller Général, ni Provincial. Joie d’avoir à la tête de la Congrégation un homme intellectuellement très doué et ouvert avec une forte expérience internationale. Et la tâche que ce nouveau Supérieur devait assumer était exceptionnelle : retourner aux sources de l’Institut et le renouveler comme le demandait le Concile (le fameux aggiornamento) et une société qui évoluait très vite. Aussitôt il commence le tour du monde mariste pour en connaître la réalité. Il laisse l’administration directe de l’Institut à son Vicaire, le Frère Quentin Duffy et prend pour lui l’animation pastorale : visites des communautés, donc voyages, et beaucoup de temps passé à recevoir et à écouter les Frères ou à leur écrire. Pratiquement il sera constamment en voyage pour rencontrer les Frères là où ils travaillent et pour animer directement des retraites dans presque toutes les provinces. Période difficile, celle qui suit le Concile : le monde, l’Église, la vie consacrée changent rapidement, au milieu d’une jeunesse contestataire et des générations adultes inquiètes. Basilio sera une grande chance pour notre Congrégation qui, grâce à lui, entreprend avec fermeté les changements demandés par le Concile. Par nature, il est ouvert à toute saine nouveauté et souvent il la devance. Pendant cette période il écrit des Circulaires remarquables : Un Chapitre pour le monde d’aujourd’hui, Les Appels de l’Église et du Fondateur, L’Entretien sur la Prière, La Vie Communautaire, cette dernière, un chef-d’œuvre lu et étudié par bien d’autres congrégations religieuses, et l’Entretien sur la prière. Celle sur l’Obéissance est un bijou de compréhension de la vie religieuse. Il avait en chantier la circulaire : Un Nouvel Espace pour Marie. Toutes le révèlent lucide sur le monde et les hommes, connaisseur des documents conciliaires et capable de les communiquer, mais surtout, profondément, un religieux, un homme familier avec Dieu. (Reconnaissons que la Congrégation a contracté une dette énorme de gratitude envers le Frère Quentin Duffy. Pendant 18 ans Vicaire de Basilio, il a assumé le travail administratif, discret, monotone, de bureau, mais qui a été indispensable et à permis à Basilio d’ouvrir toutes grandes les ailes de son génie des contacts et de l’animation.) Mais chaque fois à Rome, Basilio reprenait les rennes de l’administration.


1976: Contre son attente, ses valises étaient faites, le Frère Basilio est réélu Supérieur Général par une grande majorité de voix. Comme il l’avait déjà fait, il va se donner corps et âme dans les visites, les retraites animées, les directions spirituelles. Dans la Congrégation on s’habitue à un Supérieur Général qui travaille toutes les nuits jusqu’à 2 ou 3 heures du matin. De cette période sont les Circulaires sur le Projet de Vie Communautaire, qui devaient donner aux communautés un style de vie plus évangélique et plus apte à répondre aux appels de l’homme d’aujourd’hui et de son propre milieu. Un Nouvel Espace pour Marie présente beaucoup de vues exégétiques en avance sur son temps, ouvre un espace aux Frères pour des confidences sur leur vie avec la Bonne Mère et rassure les Frères que Vatican II n’a pas mis la Vierge à la porte. La Circulaire sur l’Oraison sera une de plus appréciée, elle correspond aussi à un des efforts les plus constants du Frère Basilio. Dans toutes les retraites qu’il donnait l’oraison avait une place prépondérante. Enfin, celle sur la Fidélité qui est comme le chant du cygne : le grand Magnificat qu’il fait chanter à toute la Congrégation Mariste. Une des joies de Basilio en expédiant cette circulaire sur les routes du monde maristea été d’avoir écrit « un paragraphe de gloire en l’honneur de l’Église : la fidélité de tant de Frères », alors qu’en tant d’aspects l’Église traversait un moment d’épreuve et parfois d’humiliation.


1985: Après le Chapitre général il jouit d’une année sabbatique, dont il consacrera une grande partie à la prière et à la spiritualité et il aura aussi le bonheur de visiter la Terre Sainte. 18 ans Supérieur Général, dans une période des plus tourmentées, il aura parcouru des milliers de kilomètres, donné de centaines de retraites, de conférences, fait travailler beaucoup l’IBM pour un résultat sérieux des enquêtes, écrit près de 2 500 pages de circulaires, dont certaines sont des bijoux de spiritualité, et plus de 50 000 lettres, accueilli des milliers : prêtres, amis, anciens élèves, frères et accompagné plus directement des centaines. Son expérience humaine était des plus riches ; sur les problèmes humains il était devenu une autorité à laquelle on faisait volontiers recours.


1986: Revenu au Mexique il sera maître des novices de la Province du Mexique Centrale. Et, invité par le Frère Charles Howard, il met tous ses efforts aussi à lancer la Famille Mariste.


1990: Il assure la direction d’un cours de 18 mois pour maîtres de novices, à l’Oasi, près du lac Albano (Rome). Si grande était la confiance qu’on lui faisait, qu’on remettait à sa responsabilité la formation des futurs maîtres de novices du monde mariste, l’avenir de la congrégation. C’est pendant ce temps que meurt, dans cette même maison le Père Rotondi, fondateur de l’Oasi et grand ami de Basilio. C’est ce père qui voulait fonder une congrégation de prêtres au service des Frères, tant il admirait Basilio et notre Congrégation. En fait, le Père Rotondi est mort dans les bras de Basilio.


1991-1996: Il retrouve son rôle de maître de novices, pour les deux provinces mexicaines. Au milieu des jeunes il est père, formateur, frère, ami. Il crée de grands espaces de liberté, de joie, de famille et d’intimité avec Dieu, dans la simplicité. Le programme de formation qu’il avait élaboré pour les novices et les spécialistes qu’il leur avait trouvés, nous laissent surpris par le sérieux, l’ampleur, l’équilibre humain qu’il visait. Il savait former des hommes, des apôtres.


1996: Le 21 janvier il entre dans la Pâque définitive par le retour au Père. La messe d’enterrement est célébrée le 23 janvier 1996 : c’est une apothéose de reconnaissance et d’amour. Suivant sa volonté il est incinéré et ses cendres reposent dans la maison de la Quinta Soledad, la maison provinciale de Mexique Centrale. Basilio nous a enrichis de sa personne, de sa pensée, de la grande affection qu’il portait à chaque Frère. Et c’est tout cela qu’il donne encore, aujourd’hui, à chacun de nous.


2002: ouverture de sa cause de Béatification


Prière pour demander la canonisation du Serviteur de Dieu Basilio Rueda, Frère Mariste


Dieu, Père très bon et miséricordieux, Tu as donné à ton serviteur, le Frère Basilio Rueda Guzmán, un cœur attentif aux besoins des autres, une dévotion tendre et filiale à notre Bonne Mère et une grande passion pour étendre ton Royaume. Nous te rendons grâce pour le don précieux de sa vie à notre Famille Mariste et à l’Eglise. Nous te demandons la grâce qu’il soit élevé aux honneurs des autels, et, permets-nous de l’invoquer à notre aide quand la maladie ou les problèmes nous angoissent. Aujourd’hui nous te demandons par son intercession… (dire la grâce que l’on sollicite) pour que, délivrés de notre mal, nous puissions te louer, maintenant et toujours. Nous te prions par le Christ, ton Fils, notre Seigneur. Amen.


(Avec l’autorisation du Vicariat de Rome)


Pour approfondir



08/03/2010
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