Spiritualité Chrétienne

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Soeur Claire de l'Eucharistie

Soeur Claire de l'Eucharistie

"Avec Frère Cancer"

1960-1984


Le 18 août 1979, une jeune Zaïroise, Muambule Astrid entre au monastère des Clarisses de Kabinda, au Zaïre, sûre d'elle-même, de sa valeur spirituelle. Son titre de première-née lui donnait droit au respect, à l'admiration de sa nombreuse famille. Les 4 femmes de son père avaient donné le jour à une vingtaine d'enfants, mais le papa n'avait d'yeux que pour son aînée à laquelle les projets de mariage ne manquaient pas! Astrid adorait son père et une parfaite communion régnait entre eux. Pourquoi fallait-il qu'à l'âge de 12 ans Astrid s'oppose à son père en se faisant baptiser dans l'Église Catholique, seule de la famille à ne pas entrer dans la secte dont il était le fondateur et le pasteur? Pourquoi six ans plus tard, devra-t-telle encore s'opposer à la volonté paternelle en entrant au Monastère des Clarisses? Quel était donc le mystérieux projet de Dieu sur cette jeune Africaine qui barrait d'un coup de plume tous les merveilleux projets paternels, tissés avec tant d'amour et d'ambition pour celle qu'il appelait « sa petite reine »? Ce projet de Dieu sur cette âme prédestinée n'apparut pas clairement aux yeux des formatrices dès les premières années qui furent très difficiles.


Astrid, devenue « Soeur Claire », habituée aux honneurs que lui manifestait sa propre famille, gardait une humeur hautaine avec ses Soeurs. Son art à manipuler la vérité pour ne pas être prise en défaut et son mépris des travaux manuels n'en faisaient pas une étoile dans le ciel de la Communauté! Seule la formation spirituelle et les heures de prières motivaient son ardeur. Travail ardu et patient pour la maîtresse des novices afin de faire comprendre à cette personnalité surfaite, combien la relation fraternelle et le travail sont parties intégrantes de la relation à Dieu dans la vie monastique. Après trois ans de formation, les fruits sont si minimes que la maîtresse, découragée, propose à l'Abbesse le renvoi. Celle-ci, avec le conseil, décide de lui donner encore un peu de temps pour cheminer, tout en lui adressant les dernières admonitions. Elles font confiance à l'Amour du Seigneur qui la porte et à la ténacité de ses décisions lorsqu'elle se décide pour Dieu! Claire entend la leçon et s'enfonce dans la prière, mais ses efforts se brisent contre un orgueil qui fait barrage à l'exaucement même de sa prière. Comment va-t-elle sortir de cette impasse?... Confiante en Celui qui l'a appelée, comme Jacob, elle ne lâchera plus Dieu avant qu'Il ne l'ait bénie!


C'est au cours d'une veillée de prière animée par Kim Kollins, qu'elle recevra l'exaucement de sa prière par une bénédiction qui va changer sa vie. Dans une lumière qui la bouleverse, elle prend conscience de sa suffisance, pivot de sa résistance à la Grâce, mais en même temps elle voit l'infinie Miséricorde de Dieu qui couvre la multitude de ses péchés. Elle craque, se rend, se donne en s'acceptant comme elle est. Soeur Claire, devenue à sa profession monastique, Soeur Claire de l'Eucharistie, peut commencer sa course: « courez donc de manière à remporter le prix... » Elle comprend que pour être épouse de l'Agneau Immaculé, il lui faut porter la Croix de son Seigneur. Elle dit oui à la folie de l'Amour de Dieu pour elle et, sans savoir que déjà le trophée de Gloire la soulève, elle s'élance dans la course. Comme tous les coureurs du stade, elle aura ses chutes et ses rechutes, nos défauts nous précèdent et ses changent en pierres du chemin. Claire en fera l'amère expérience mais, cette fois, l'expérience sera positive, elle s'enfoncera dans l'humilité en gardant les yeux fixés sur la Miséricorde du Père Céleste qu'elle aime d'un amour confiant.


Dans son corps, la terrible maladie commence sournoisement son oeuvre. Aucun symptôme particulier ne se découvre encore, sinon une grande fatigue que soeur Claire essaiera de compenser en mangeant davantage « pour prendre la force », dira-t-elle e, riant, à son entourage étonné. Des maux de têtes la tiennent éveillée la nuit malgré les calmants. Elle prie, elle sait qu'elle porte sa croix, elle marche dans la joie, elle sait qu'elle a dit « Oui »! En octobre 1983, à partir d'une radio-dentaire, le désastre se découvre: le cancer de la face a déjà fait ses ravages. Opérée d'urgence, le spécialiste ne donne pas d'espoir de survie au-delà de trois mois à cette jeune Soeur de 22 ans. Le Seigneur en aura besoin de six pour achever son oeuvre.


L'amour l'entraîne toujours plus loin. Sur la table d'opération, Claire offre sa vie pour les Prêtres, les biens-aimés du Père, mais au passage elle ramasse aussi la croix abandonnée par ceux qui ont trahi le Christ. C'est alors que, libérées du souci de sa propre vie et occupée à sauver celle des autres, en union avec Jésus Crucifié, elle peut accueillir le don de la prière continuelle auquel elle sera fidèle jusqu'à sa mort.


Saint François, le Petit Frère universel, libéré de toute peur, appelait « notre soeur la mort » celle qui lui ouvrait les portes du Royaume. Claire, dans le même esprit, appellera son mal « frère cancer ». Elle dira simplement: « Frère cancer fait son travail, moi, je fais le mien. Mon travail, c'est de louer le Seigneur dans la joie, la souffrance, telle que je suis. C'est dans les moments difficiles qu'il faut Le louer, Lui rendre grâce! » Ce « travail » elle l'accomplira sans défaillance, jour après jour, pendant sa maladie. Elle rayonnera dans le don d'elle-même, à travers un visage qui n'a plus figure humaine. A ceux qui la visitent elle parle du Ciel, comme on parle des vacances qui approchent. De « frère cancer », elle ne se plaindra jamais, ni de la souffrance qu'il lui donne, elle le laisse faire son travail, elle en connaît le prix: elle s'offre et se retrouve toujours « plus haut »! Jusqu'au moment où elle achèvera sa course folle en ce 1er avril 1984. Quelques jours avant, elle dira en faisant le geste d'offrir un calice: « C'est pour tel Prêtre que j'offre ma souffrance, mon lit est l'autel où se consomme mon sacrifice! »


Le sacrifice est achevé, elle a remporté le prix de sa course! Son témoignage peut se résumer par ses propres paroles que nous citons textuellement: « Le Seigneur m'appelait pour porter la croix avec Lui... Au moment de me faire opérer, j'ai dit au Seigneur: je T'offre ma vie pour tous les Prêtres. C'est à ce moment-là que j'ai compris que le Seigneur voulait que je l'aide à porter la croix pour la sainteté des Prêtres, pour tous ceux qui Le renient... Le Seigneur veut que tous les hommes reviennent vers Lui dans la joie et dans l'amour... Il n'y a pas de plus grand bonheur que de connaître Dieu, de Le chanter, de Le louer! »


Texte extrait du magazine « Sources Vives », n° 50 de juillet 1993


Bibliographie

« J'ai dit oui au Seigneur », Frère Marc, Editions des Béatitudes

 



27/04/2009
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