Bienheureuse Hidegard Burjan
Bienheureuse Hidegard Burjan
Pionnière de l'aide sociale et fondatrice de Caritas Socialis
1883-1933
Fête le 11 juin
Dans la vie exceptionnelle de Hildegard Burjan, tout est épreuve, combat, courage, engagement, dépassement, abnégation, amour. Rien ne prédisposait Hildegard à son destin exceptionnel. Elle naît le 30 janvier 1883 à Görlitz, en Prusse-Silésie. Ses parents Abraham et Berta Freund, juifs, non pratiquants, font partie de la bourgeoisie moyenne. Hildegard fait des études universitaires, ce qui est relativement rare pour une jeune fille de cette époque. Ce sont des études de langue, de littérature et de civilisation allemandes à l'université de Zurich ainsi que de philosophie. Un haut idéal et une longue recherche intérieure l'amènent à se poser des questions sur le sens de la vie. Ses études finies, le 2 mai 1907 elle se marie avec Alexandre Burjan, Hongrois d'origine juive, ingénieur. Le couple s'installe à Berlin.
Le 9 octobre 1908, Hildegard gravement malade, est hospitalisée, pour colique néphrétique à l'hôpital catholique Sainte Hedwige. Lors de la Semaine Sainte de 1909, elle est dans un état désespéré. De la morphine lui est administrée pour soulager ses douleurs. Elle prend congé de son époux. La mort est là. Puis le lundi de Pâques, son état s'améliore de façon miraculeuse. Après sept mois d'hospitalisation, elle regagne la maison. Les séquelles de cette terrible maladie la poursuivront toute sa vie. Cette expérience va la transformer. Elle est touchée par la grâce de Dieu à travers l'abnégation des Soeurs de St. Charles Boromée, qui l'ont soignée. C'est son coeur et non son raisonnement qui la conduit à la foi. Le 11 août 1909, le sacrement du baptême lui est administré. Peu à peu, elle conçoit que cette nouvelle vie que lui a accordée Dieu, elle doit la consacrer au service des autres, des démunis. Cette même année, les Burjan s'installent à Vienne où Alexandre obtient un poste de direction. Hildegard prend contact avec les groupes catholiques engagés dans la mise en oeuvre de la première encyclique sociale du Pape Léon XIII.
Suite à de nombreuses opérations, elle ne pouvait pas porter d'enfant. Subitement, son engagement doit être freiné par l'attente d'un enfant qui met à nouveau sa vie en danger. Elle refuse l'avortement, conseillé par les médecins et doit être longuement hospitalisée. Contre toute attente, elle donne naissance à une fille, Lisa, en bonne santé! Les années qui suivent sont consacrées à la réalisation de son projet social. Sa première préoccupation va à la misère des ouvriers, qui n'ont aucun droit social et tout particulièrement aux travailleuses à domicile. Pour un salaire de 12 couronnes, tout juste suffisant pour vivre, elles doivent travailler quinze heures par jour. Avec des collaboratrices bénévoles, elle les visite et développe un projet innovateur: "l'aide à s'aider soi-même". Elle attire l'attention sur leurs droits et établit avec elles un catalogue de leurs revendications.
Le 13 décembre 1912, Hildegard fonde "l'Association des ouvrières chrétiennes à domicile", obtient l'amélioration de leurs salaires et de leurs conditions de travail. Le 16 avril 1914, lors d'une conférence, elle demande à l'Etat des lois et des règlements en faveur de la profession. Elle attire l'attention sur l'abus lié au travail des enfants, car la journée de 14 heures est fréquemment le lot des enfants de six ans. A l'issue de la conférence Hildegard est nommée "mère des ouvrières à domicile". Pendant la Première guerre mondiale elle multiplie son aide à la population en détresse, institue entre autres l'achat en gros de denrées alimentaires. Après la guerre elle préconise pour les femmes : "à travail égal, salaire égal". Ce qui n'est que justice pour des femmes qui ont assumé, avec succès le travail des hommes partis au front. Elle devient présidente du premier rassemblement politique des femmes chrétiennes. Le nouveau code électoral accorde le 21 octobre 1918 le droit de vote passif et actif aux femmes. Le 3 décembre 1918, Hildegard entre au conseil municipal. Elle devient la vice-présidente et la seule femme du parti des chrétiens-sociaux, conduit par Leopold Kunschak. Ce mandat politique, accordéà une femme d'origine juive, est des plus inattendus dans un parti où régnaient alors des tendances antisémites.
En 1919, elle fonde l'ordre de la Caritas Socialis dont elle devient et restera jusqu'à sa mort la première supérieure. Les soeurs y font les traditionnels voeux d'obéissance, de pauvreté et de chasteté. En 1920, elle se retire de la vie politique pour se consacrer totalement à l'ordre de la communauté des sœurs de la Caritas Socialis. "Caritas Christi urget nos": l'amour du Christ nous presse. Des femmes s'engagent, en totale disponibilité, dans cette communauté religieuse pour aller au devant de la misère autant matérielle que spirituelle, en premier lieu celle de jeunes délinquants, de prostituées. Elles sont présentes dans les gares, elles accueillent dans des foyers des femmes sans domicile. L'urgence est grande dans cette période de misère extrême. Elle obtient le soutien financier des pouvoirs publics. En 1926, la Caritas Socialis s'installe à Berlin, Munich et en Tchéquoslovaquie. En 1933, âgée seulement de cinquante ans, Hildegard décède épuisée par la maladie et son dévouement extrême.
Mais qu'est devenue au cours de l'histoire cette communauté en évolution permanente, toujours prête à réagir aux besoins de son temps ? En 1938, à l'arrivée des nationaux-socialistes, son travail se retire dans l'Eglise. Pendant la Deuxième guerre mondiale, les soeurs travaillent dans des hôpitaux, accueillent des réfugiés, aident des personnes vivant dans la clandestinité. Après 1948, la Caritas Socialis s'exporte dans le monde: Tyrol du Sud, Bavière, Rome, le Brésil. Dans ce dernier pays, elle aide les familles les plus misérables à accéder à la propriété de leur maison et à une formation professionnelle, à lutter contre la sous-alimentation. En Autriche les soeurs sont formées aux professions sociales et pastorales pour aider des enfants handicapés, des malades, des familles et des femmes seules en détresse avec enfants. Elles travaillent dans leurs hospices et centres de retraite, jardins d'enfants. Une permanence ouverte aux personnes en difficulté aide et conseille. Des bénévoles et des amis soutiennent la communauté dans ses grandes activités. Les sœurs vêtues en civil, ressemblent à nous toutes si ce n'est qu'elles portent la croix, la broche et la bague de l'ordre. Le marché de Noël a lieu la première fin de semaine de l'Avent. On peut y acheter ses cadeaux, des objets faits main, des produits de l'artisanat, de la pâtisserie maison, des décorations. Ce marché est fameux!
Depuis 1939, la Caritas Socialis était une communauté de droit diocésain. En 1960, elle devient une communauté de droit papal. Le 6 juin 1963, la procédure de béatification d'Hildegard est engagée. En 2001, est clos ce qu'on appelle le procès du miracle qui est l'authentification d'un miracle attribué à son intercession. Le 29 janvier 2012, la béatification de Hildegard Burjan a été proclamée à la Cathédrale Saint Etienne de Vienne. La béatification est la déclaration qu'une personne a pratiqué les vertus naturelles et chrétiennes de façon exemplaire. Sa vénération publique est alors autorisée. L'admission de Hildegard Burjan, épouse, mère, femme politique, fondatrice d'un ordre religieux et première supérieure, portée par l'amour du Christ, à cette vénération, est une première dans l'histoire de l'Eglise autrichienne. Ecoutons une soeur : "La combinaison, mariée et fondatrice d'un ordre est déjà extraordinaire, mais de plus femme politique et première supérieure jusqu'à son lit de mort, est exceptionnelle." Hildegard Burjan, une femme hors du commun, est devenue pour de nombreuses personnes dans la société et la politique un modèle vivant, un encouragement, une fierté pour l'Autriche. Hildegard Burjan repose dans la chapelle de la Caritas Socialis, dans la Pramergasse à côté d'un de ses hospices.
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